Page 1 of 2 12 LastLast
Results 1 to 10 of 11

Thread: Une Himp probable épopée

  1. #1

    Default Une Himp probable épopée Saison 1

    [RP]Les rares crocodiles qui n’avaient pas succombé à la léthargie distillée par le soleil de plomb qui écrasait la plage de Tortage en ce début d’après midi eurent le loisir d’assister à un bien curieux spectacle.
    Mais quel était donc cette étrange créature maladroite toute de bleu vêtue qui tantôt chancelait dans le sable tantôt se ruait derrière les buissons d’hévéa, comme si une envie pressante la tenaillait?
    Engoncé dans sa cape azur, la démarche titubante occasionnée par les monceaux de sable blanc qui s’accumulait dans ses souliers, le juron à la bouche, un jeune homme blond cherchait à se frayer un passage à travers la grève infestée de crocodiles et des cadavres, vestiges d’un précèdent naufrage.
    Un observateur attentif aurait noté que le visage, actuellement congestionné par l’action combinée de la chaleur et de la peur, l’accent des jurons débités à quantité industrielle portaient de toute évidence la trace de la noble culture aquilonnienne.
    “Par Mitra, est-ce donc cette contrée que l’on ose nommer le joyaux des Barracas?
    Depuis mon arrivée, j’ai déjà essuyé le courroux de trois crocodiles, sans parler de la puanteur des pauvres bougres qui visiblement ont écourté leur cours de natation. Quel spectacle affligeant...
    Quand je pense qu’hier encore, je me trouvais plongé sur un des plus précieux manuscrits d’Epimerteus que conserve la bibliothèque de Tarantia la Vieille… Ah… douce et précieuse Tarantia...
    Ha! mais quelle est donc cette horrible chose qui vient de se refermer sur mon pied?”
    Retirant à grand peine la cage thoracique décomposée que sa chaussure droite venait de traverser en un horrible craquement suivi d’une puanteur et d’un essaim de mouches, l’aquilionien poursuivit à grand peine sa progression, supportant avec ce qui lui restait de stoïcisme chaleur et l’inconfort de sa tenue, certes idéale pour un érudit mais en aucun cas adaptée pour la contrée hostile et surchauffée dans laquelle le jeune homme avait eut la malencontreuse idée de s’aventurer.
    “Si je rappelle bien les termes de l’oracle que mon mentor, le chancelier du grand temple de Mitra m’a tenu, je dois me diriger sans hésitation aucune vers un rocher en forme d’ours...
    Pour l’instant, d’ours je n’en vois point, mais de ces saletés de sauriens, il en grouille de partout! Leur façon de ramper me répugne au plus haut point! Ha, non, ça ne va pas recommencer, un de ces lézards surdimensionnés me confond avec son déjeuner!”
    Dans un élan de peur plus que de courage ou d’agressivité, il se saisit d’un gros morceau de rame échoué qu’il abattit sans la moindre technique sur le crâne du crocodile, avant que celui-ci ne referme sa mâchoire sur sa jambe…
    “Par la lumière de Mitra! Cette douleur est insoutenable! Je me vide de mon sang!”
    S’écria- t’il en tentant de retirer une petite écharde que la rame venait de planter dans la paume de sa main.
    “Ah oui! Vite,euh... mettons en application ce que mon Maître m’a appris, voyons…. oui c’est ça, invoquons la puissance des soins de Mitra… euh… la Vague de Vie...bon sang, c’est comment déjà...vite, oui c’est ça…”
    Il étendit le bras devant lui, une aura bleutée l’habilla, l’écharde s’extirpa de sa plaie et le sang cessa de suinter.
    “ Bien,voilà qui va mieux ainsi. On est loin des miracles d’Epimerteus qui soignait une armée entière de 1000 hommes en un seul sort...mais c’est un bon début.”
    L’apprenti prêtre de Mitra, puisque tel était le statut de ce bien piteux aventurier, ne put s'empêcher de songer combien ses excellentes notes en matière de théologie, histoire des prophètes n’étaient absolument d’aucune utilité sur cette plage au sable aveuglant.
    Honteux,il songea qu’il aurait dû travailler d’avantage ses cours de soins.
    Depuis qu’il était confronté à la barbarie de cet univers peu clément pour les érudits, il regrettait amèrement de ne pas avoir suivi avec davantage d’assiduité les cours de sorts hostiles.
    Méprisant jusqu’ici cette matière qu’il estimait destinée à des brutes sans cervelle, il se mordait les doigts d’avoir tiré tiré fierté d’être arrivé avant dernier de sa promotion en la matière.
    Himp, car ainsi se nommait notre prêtre, regarda la rame brisée posée sur le crâne du crocodile assommé, et, se disant qu’il était la honte des Prêtres de Mitra.
    Il ramassa l’arme de fortune, reconnaissant qu’il avait plus confiance en le pouvoir contondant de ce simple morceau de bois qu’en ses propres dégâts de magie sacrée.
    Se rappelant l’objet de sa présence sur l’île et les enjeux qui reposaient sur ses épaules trapues, Himp se redressa de toute sa petite taille et dans un élan de courage tenta de réviser ses incantations.
    “Réprimande, Foudres de Mitra et….ah oui Répulsion...Réprimande, Foudres de Mitra…”
    Sa litanie eut pour effet d’effrayer les crocodiles qui décidèrent d’abandonner cet étrange personnage qui scrutait avec attention les formes des rochers émergeant de l’eau turquoise.
    Himp commençait à désespérer de trouver ce satané ours minéral quand il vit au bout de la crique son imposante silhouette se profiler.
    Notre prêtre, rempli de courage se hâta aussi vite que sa tenue pouvait lui permettre, en direction de son but, espérant la fin de ses épreuves dans ce monde bien trop barbare à son goût,
    Mais sa satisfaction, de même que ses espoirs de revoir rapidement la bibliothèque de Tarantia, furent de courte durée.
    Au pied du rocher, entourant ce qu’il était venu chercher s’affairait une horde de pillards dont la puanteur était presque effrayante que les armes et scarifications qu’ils arboraient.
    S’abritant derrière les feuilles d’hévéa dont il commençait décidément à apprécier leurs qualités de camouflage, Himp observa les pirates occupés à récupérer la cargaison vomi sur le sable par le navire échoué dont on devinait la silhouette suppliciée au large.
    Les crasseux voleurs repérant un coffre ayant jusqu’ici échappé à leur convoitise, s’écartèrent du rocher en forme d’ours.
    L’espoir se mit à renaître dans le coeur du petit prêtre malgré la terreur que lui inspiraient ces pirates qui cumulaient à la sauvagerie et à la vulgarité un manque d'élégance certain.
    Sur le sable, gisait l’objet de ses recherches, un homme, très mal en point, certes mais indéniablement, il restait un peu de vie en lui...[/RP]

    A suivre...
    Last edited by Himp; 1st January 2014 at 09:23.
    La ballade de Himp

    Vous aimez, ou vous n'aimez pas mes chroniques? N'hésitez pas à m'envoyer vos commentaires par MP!

  2. #2

    Default

    [RP]Mais par quels assemblages de stratagèmes alambiquées la destinée farceuse de Himp s’était elle donc prise afin de l’amener à errer sur les plages aussi blanches qu'inhospitalières de Tortage?
    Pour avoir une chance de démêler l’écheveau des circonstances malheureuses qui conduisirent l’apprenti prêtre, aspirant à une carrière paisible de traducteur de textes anciens et ne présentant aucune, mais alors aucune prédisposition à la vie aventureuse des guerriers barbares, il faut, si vous le voulez bien, remonter à quelques lunes auparavant...

    -Tarentia la Vieille-

    L’archiprêtre releva la tête de sa table de travail et constata avec stupeur que l’obscurité, aussi silencieuse qu’un chat, avait désormais envahi la petite cellule qu’il occupait lorsque ses travaux de recherche requéraient silence et concentration.
    Le vieil homme passa une main lasse sur ses yeux brûlants à force d’avoir trop scruté les caractères aussi anciens qu’énigmatique.
    Une journée de travail supplémentaire avec si peu de résultats à la fin...Par tous les démons que Mitra avait purifié de sa lumière divine, verrait-il le fruit de ses efforts aboutir avant que ses forces ne déclinent et que n’arrive le terme de son existence?
    L‘archichancelier grimaça en entendant la cavalcade désordonnée mais néanmoins reconnaissable d’un de ses jeunes assistants.
    Ces apprentis... A croire qu’ils ne savaient pas se déplacer autrement qu’en courant comme des jeunes chiens fous… et puis cette manière de s’adresser à lui avec un mélange de terreur inspirée par son haut rang et de commisération due à son grand âge et à sa décrépitude physique.
    Quelle ne fut pas la surprise de l’archichancelier en entendant la voix haletante du grand prêtre Cautopates lui demander la permission d’entrer..
    “Monseigneur, un évènement totalement inattendu vient de se produire..
    La pythie est sortie d’elle même de sa léthargie et a rendu son oracle le plus puissant...
    et cela sans aucune invocation de notre part!”
    Puis Cautopates se mit à débiter des mots tellement invraisemblables qu’ils ne pouvaient être qu’un fatras de sornettes.
    L’archichancelier considéra attentivement son interlocuteur. Presque aussi âgé que lui, le grand prêtre était connu pour être un homme austère et sans imagination, Pourtant les propos qu’il venait de tenir à son supérieur étaient pour le moins farfelus et fantaisistes.
    L’archichancelier allait conseiller à Cautopates de rentrer chez lui, se détendre et pourquoi pas trouver un peu de réconfort en buvant une tasse de potion “retourne tête”, une fois n’est pas coutume..
    Mais le regard fixe du grand prêtre enlevèrent toute velléité à l’archichancelier de tapoter amicalement l’épaule de son interlocuteur.
    “Vous vous rendez compte, je suppose de la teneur absolument improbable de ce que vous venez de me déblatérer?”
    Le grand prêtre hocha la tête, fixant toujours l’archichancelier de son regard halluciné.
    Les épaules de l’archichancelier se seraient affaissées si l’âge ne s’en était pas déjà chargé.
    “Bien, j’imagine qu’il ne me reste plus qu’à aller voir ce phénomène…”

    Au centre du temple, les torches jetaient des lueurs troubles et fumeuse qui semblaient davantage contribuer à l’obscurité ambiante plutôt qu’à éloigner celle-ci.
    L’archichancelier se dirigea sans hésiter vers le trépied de bronze qui se trouvait aux pieds de la statue de Mitra.
    Une forme affaissée, vêtue d’une toge froissée, la tignasse mangeant son visage, y était recroquevillée.
    La pythie semblait plongée dans ce sommeil dont seuls les grands prêtres savaient la tirer afin de lui faire délivrer ses oracles.
    Au moment où l’archichancelier se demandait qui nommer à la succession du grand prêtre qui visiblement n’était plus en possession de toute ses facultés mentales, la pythie se redressa, sans aucune intervention humaine, ce qui était impossible..
    Une étrange lumière bleue, phénomène jusqu’alors inconnue, émana de la prophétesse.
    Poussant des cris si épouvantables qu’ils auraient glacé même le sang d’un démon chauve-souris, elle délivra son oracle le plus puissant.
    Puis, telle une poupée inarticulée, la femme retomba, inanimée sur son trépied de bronze, endormie comme si il ne s’était rien passé, ronflant légèrement.
    L’archiprêtre, repoussant les vagues de terreur qui s’emparaient de son esprit, fit résonner dans son crâne les termes de l’oracle tels que son esprit brillant et érudit l’avait traduit.
    puis il se tourna vers le grand prêtre.
    “Vous disiez vrai, aussi improbable que cela puisse paraître..Nous n’avons pas d’autre choix...Allez le chercher immédiatement.”

    -Bibliothèque de Tarentia la Vielle-
    La plume voltigeait avec tant de rapidité sur le parchemin que la lueur vacillante de la chandelle ne suffisait pas à suivre la cours de l’encre sur le vélin.
    Le regard fiévreux de Himp faisait sans discontinuer des allers retours entre un document si ancien qu’il ressemblait davantage au contenu d’un estomac de xylophage boulimique qu’à un papyrus et son dictionnaire écorné par un usage compulsif.
    Le jeune prêtre semblait cependant n’avoir aucune peine à déchiffrer les traces écrites qui subsistaient dans cette bouillie de papier fossilisée.
    Posant avec délicatesse sa plume sur son manuscrit, Himp s’apprêtait à recopier avec le plus grand soin un étrange symbole quand son nom hurlé à travers le sanctuaire de silence qu’était la bibliothèque le fit déchirer son précieux parchemin.
    “Par la lance de Mitra! j’en ai plus qu’assez de vos bizutage à trois étains! Je ne demande qu’un peu de calme et de silence! je ne viens pas vous faire la leçon quand vous aller taquiner la bouteille, et je dirai même..” Sa voix retomba dans une boue de stupéfaction lorsqu’il vit le spectacle du visage grave du grand prêtre surgissant entre les rayonnages.
    “Ho, monseigneur, je suis confus..”
    La face de marbre du grand prêtre ne trahit aucune émotion.
    “Viens, jeune Himp, tu es attendu par l’archichancelier en personne au grand temple de Mitra.”
    Laissant là son ouvrage, le jeune apprenti suivi son supérieur le coeur battant.
    “Enfin, mes qualités de traducteurs sont reconnus, mes efforts sont enfin récompensé! Je vais certainement devenir le prochain disciple de l’archichancelier..je ne vois absolument aucune autre raison à cette convocation si tardive..”[/RP]
    ...A Suivre...
    Last edited by Himp; 23rd September 2013 at 19:21.
    La ballade de Himp

    Vous aimez, ou vous n'aimez pas mes chroniques? N'hésitez pas à m'envoyer vos commentaires par MP!

  3. #3

    Default

    PARTIE 3

    [RP]
    Se cognant aux les colonnes de marbre bleutées par le clair de lune, Himp tentait de suivre l'allure rapide du grand prêtre qui, sans pitié aucune pour les petites jambes du novice, évoluait sans encombre en direction du grand Temple.
    Comme à chacune de ses visites en ce lieu sacré, Himp se sentait écrasé par la majesté, la splendeur et la solennité de la demeure de la Mitra.
    Comme il se sentait alors petit et insignifiant!
    Ce sentiment s'accrut quand il vit avec terreur la délégation des apprentis et Maîtres s'avancer vers lui avec une lenteur un peu trop officielle à son goût.

    "Himp!"

    Le jeune prêtre ne put s'empêcher de sursauter en entendant la voix de bronze de l'archichancelier prononcer son nom.
    Ignorant les ricanements à peine étouffés des apprentis, Himp s'approcha avec déférence du plus haut serviteur de Mitra en ce monde.
    Se dirigeant vers la silhouette voûtée qui se trouvait entre ombre et lumière, Himp se risqua à lever ses yeux vers le visage ridé au regard perçant.

    "Himp, Mitra nous fait parvenir un message de la plus haute importance ce soir."

    Agenouillé devant l'archichancelier, le jeune prêtre observait la plus grande immobilité, malgré le tourbillon de pensées qui envahissaient son esprit. Il était persuadé que chacun pouvait voir qu’il tremblait de tout son être.
    Par tous les démons que la main de Mitra avait réprimandé, que lui voulait on à la fin? L'instant et les visages semblaient bien trop grave pour que cela ait quoi que ce soit en rapport avec les textes des anciens qu’il s’entêtait à traduire malgré le désintérêt général.
    L'inquiétude et l’appréhension, prémices de la panique commencèrent à s'insinuer dans l'esprit du jeune homme.
    La voix de bronze et d'airain de l'archichancelier s'éleva de nouveau

    "L'oracle nous a délivré un message de la plus haute importance..Et cela concerne ta destinée, jeune Himp, pas seulement la tienne, celle des continents civilisés, de ceux sur le chemin de la lumière… tout le monde sacré avançant dans la Lumière de Mitra ainsi que celui en passe de l'être...!"

    Les torches projetaient des étincelles rougeâtres qui ne contribuaient que trop à accentuer le caractère angoissant de la scène au goût de l'intéressé.

    "Voici les termes exacts que l'oracle, voix divine de Mitra portée à nos oreilles terrestre, nous a révélés et  dont je me porte le témoin :
    Lorsque le Cercle Noir couvrira le Cercle Blanc, les Ténèbres trouveront la porte menant aux sept continents et la vague déferlante balayera toute trace de vie et de lumière.
    Face à l'apocalypse, Xantos-Uros-Micros son frère sauvera des bras des Set du naufrage du Pyros, près du rocher de l'Ursa, dans l'anse occidentale du joyaux des Barracas au troisième quartier du Cercle Noir.
    Le chemin de leur patrie retrouveront, la suite des oracles ils attendront.
    L'avenir de la Lumière de leur bravoure dépend... »


    L'archichancelier se tut, resta quelques instants en apnée, puis repris bruyamment son souffle :
    « La fin des mondes, jeune apprenti, la fin des mondes, et Mitra nous dit que toi seul peut t'opposer à cela. »

    Le désarroi de Himp était total. Comment l'archichancelier pouvait-il croire que lui, un érudit plus aguerri à la manipulation des grimoires qu'à celle des armes pouvait se charger d'une mission qui s'apparentait davantage à un suicide qu'à une promenade de santé?
    Les digues de son esprit commencèrent sérieusement à ployer devant la marée de panique qui s'annonçait.
    Brisant avec le protocole qu'il avait si scrupuleusement respecté sa vie durant, Himp s'éclaircit la gorge.

    "Hum..Sauf votre respect, Monseigneur, comment pouvez vous être certain que l'oracle parlait de moi? La destinée que vous venez de me révéler ne correspond en aucun point à mes projets professionnels...Voyez vous, je suis sur le point d'achever la traduction d'un très ancien texte qui sera, j'en suis certain, capital dans notre compréhension du culte rendu à Mitra par les peuplades des Anciens de l'Aquilonie...Vous comprendrez bien qu'il n'est dans l'intérêt de personne que j'abandonne la bibliothèque alors que je suis sur le point de parvenir à un point crucial de mes investigations.."

    L'archichancelier chassa d'un revers de main les arguments savamment exposés du jeune prêtre, qui ne put s’empêcher de se sentir vexé.

    "Ta jeunesse et ton inexpérience excusent les doutes que tu nourris à l'égard de la prophétie te concernant.Je voulais épargner ta susceptibilité devant tout le monde, mais toi qui es, semble t'il l'un des experts les plus reconnus en traductions de textes de Anciens, je t'invite à te pencher sur le nom de - Xantos-Uros-Micros - , qui signifie t'il pour toi ? »

    Himp était tellement impressionné qu'il avait totalement inhibé ses automatismes de traducteur. Bien sûr que ce nom, auquel il avait à peine fait attention en regard de la gravité des propos de l'oracle, était des termes d'Aquilonien Ancien.
    Le cerveau du traducteur repris pied rapidement sans même qu'il s'en rende compte.

    « Xantos, blond, uros, urine, micros, petit....ça nous fait donc dans l'ordre....LA VACHE ! »

    S'exclama-t'il, pensant à voix haute sans même s'en rendre compte.
    Rempli de honte et de confusion, Himp ne put s’empêcher de grimacer en entendant les apprentis qui s'esclaffaient bruyamment à l’énoncé du vil sobriquet inventé par son frère que lui avait valu la couleur de ses cheveux, sa petite taille et un malencontreux accident d''incontinence pendant son enfance. 

    « Petit Blondin Pisseux »

    Voilà le délicat sobriquet dont l'avait affublé le tortionnaire qui lui avait servi de petit frère et qu'il s'était employé à oublier jusqu'à cet instant précis...

    Occultant le caractère horriblement épique de la quête qui lui était destinée,Himp éprouva un ressentiment certain envers Mitra qui aurait pu l'identifier en évoquant ses compétences intellectuelles ou ses yeux gris que les filles de Tarantia s'accordaient à trouver charmant quand ils regardaient tous deux dans la même direction...
    Mais les tourments de Himp n'étaient pas terminés pour autant.
    L'archichancelier reprit la parole.

    "Himp, je me suis employé à interpréter au plus près chaque détail de l'Oracle, afin que nous ne commettions pas la moindre erreur, tu ne seras ainsi pas seul au monde dans cette épreuve. »

    Le jeune prêtre reprit espoir. Sa famille avait quelques moyens financiers, qui sait, en payant un mercenaire, cette aventure pourrait s'achever sans trop d'encombre?

    "Jeune Himp, ce soir nous arrivons au 20ème jour de la Lune gibbeuse descendante. Notre Seigneur Mitra nous avise qu'au 3ème quartier tu devras te trouver sur l'île de Tortage, dans l'anse occidentale. Un bateau d'esclavagistes, le Pyros aura fait naufrage suite à une des tempêtes de l'équinoxe. Tu cherchera un rocher émergé en forme d'ourse. Au pied de ce rocher tu retrouveras aux portes de la mort...ton frère. Tu le ramèneras jusqu'ici... Il devra t'aider dans l'immense tâche qui t'attend."

    Pardon,? Partir à l'aventure dans une terre inconnue et inhospitalière, Himp aurait pu s'y faire. Mais faire équipe avec celui qui avait fait de ses jeunes années un véritable enfer, il n'en était pas question!
    L'annonce d'un possible retour de son petit frère tant déteste dans sa vie fut le coup de grâce pour Himp qui ne put encaisser le choc.
    Dans un dernier effort de conscience, Himp demanda :

    « C'est pour quand, ce 3ème quartier du Cercle Noir ? »
    L’Astrologue du Temple, toujours prêt à se faire mousser, répondit sans même qu'on lui donne la parole :
    « Demain, pardi ! Le 21ème jour de la Lune gibbeuse ! Je vous jure, ces linguistes...jamais au courant de rien d'important.... »

    La fin de ses propos se perdit en grommellements à peine audibles dans l'enchevêtrement des poils broussailleux de sa barbe...

    L'archichancelier baissa les yeux vers le jeune homme qui venait de s'écrouler par terre et qui gisait tel un pantin démantibulé sur le dallage en calcaire blanc du Poitain.
    Le saint homme appela son plus proche assistant.

    "Prenez soin de ce novice, j'ai dans l'idée que la grâce que vient de lui faire Mitra est un honneur sans doute trop écrasant pour être assimilé par son esprit.."

    L'archichancelier contourna délicatement la silhouette sans réaction de Himp.

    "Il conviendra de localiser au plus vite son frère afin que nous les réunissions au plus vite. Je dois pouvoir créer un Portail de Transport jusqu'au Temple de Ninus, au plus proche des lieux du rendez -vous. Nous avons peu de temps, et je dois avouer que l'émotion du jeune Himp à l'annonce de ces retrouvailles fraternelles m'a touché. Bref, je suis trop sensible..."[/RP]

    A suivre...
    Last edited by Himp; 23rd September 2013 at 19:21.
    La ballade de Himp

    Vous aimez, ou vous n'aimez pas mes chroniques? N'hésitez pas à m'envoyer vos commentaires par MP!

  4. #4

    Default

    Partie 4

    -Plage de Tortage-


    [RP]

    Tel l'amoureux transi qui, n'en revenant pas de tenir enfin sa dulcinée dans ses bras, Himp enlaçait fermement le tronc du palmier, endroit qui lui semblait alors le plus sûr au sein de cet infect chaos tropical où l'avait jeté l'archichancelier, sans ménagement aucun pour les sentiments plus que mitigés qu'une telle aventure éveillait dans l'âme délicate du jeune prêtre.

    Plus tremblant que s'il avait été aux prises avec ces fameuses bourrasques aquilonniennes qui s'employaient à faire tourner les ailes des moulins à vents plantés sur les collines du pays de son enfance, Himp agrippa d'une main moite et peu convaincue son morceau de rame, qui avait représenté jusque là sa plus fidèle alliée dans le combat sans merci qu'il avait dû livrer contre les crocodiles et les monceaux de sable remplissant ses bottes avec une persévérance désespérante.

    “Et dire que je n'ai même pas demandé une quelconque gratification en échange de ce véritable cauchemar..Bon sang, quand je pense que la place de maître des études sacrées est vacante..J'aurais dû la réclamer...C'est tout moi, ça, laisser filer de telles occasions... C'est sûr que ce n'est pas son genre, à LUI...”

    Himp concentra son regard vers la silhouette inanimé de Zgavier, son petit frère, étendu sur le sable blanc. Celui-ci, n'était plus vêtu que d'un simple pagne, parvenant à peine à masquer les parties intimes de son athlétique anatomie, ainsi que quelques lambeaux de tissus attestant qu'à un moment ou un autre il avait fait l'effort de se vêtir un peu plus décemment. Les vagues douces de la mer bleue ciel des Barracas léchaient ses pieds nus.

    “Bon...C'est pas tout...Mais j'ai un monde à sauver et j'aimerai bien être rentré avant le début de la saison universitaire...Je ferai bien d'y aller”

    Moitié courant, moitié tombant, Mitra seul sait comment Himp parvint à ne pas attirer l'attention des pirates et à échouer auprès de son frère.
    L'absence de blessure, la large poitrine s'abaissant et s'élevant régulièrement rassurèrent le prêtre qui, soyons honnêtes, ne possédait pas une grande maîtrise pratique des soins sacrés...
    Son cœur sensible se serra au spectacle des restes de vêtements de pirate déchirés, des fers que portait son frère aux poignets...
    Qu'était il donc arrivé à Zgavier pour qu'il échoue de si misérable façon sur le sable blanc des Barracas?
    Puis il se souvint que dans une de ces innombrables lectures il avait appris que ces bracelets étaient posées par les trafiquants d'esclaves afin de marquer leur propriété, donnant à ces hommes et femmes à peine plus de valeur qu'une bête de somme.

    Un esclave... son frère était un esclave... comment son petit frère en était arrivé là ? Sans doute enchaîné à une rame de galère...

    En expert de linguistique, Himp déchiffra aisément les symboles Stygiens : «Propriété de Sadur - Khémi»
    Le jeune prêtre fut totalement désarçonné par la puissante émotion qui le submergea en contemplant le visage amaigri et buriné de Zgavier...
    Combien de lunes s'étaient levées et couchées depuis leur dernière rencontre?
    La dernière fois qu'ils s'étaient retrouvés rassemblés, Zgavier n'était encore qu'un adolescent qui, malgré sa stature fluette évoquant avec une précision cruelle un serpent du désert de Kopshef sous alimenté, ne rêvait que des montagnes enneigées de Cimmérie et des combats épiques qu'il ne manquerait pas de livrer.
    Himp essuya machinalement la larme qui avait glissé le long de son nez en trompette.

    “Mon frère..Te voilà un homme désormais... Je sens au fond de mon cœur que nous saurons oublier nos querelles d'enfants et avancer fraternellement, respectueux l'un de l'autre sur ce chemin pavé d'embûches que le destin nous impose d'emprunter...”

    Se recueillant, Himp étendit le bras devant lui, une aura bleutée entoura les deux frères.


    ________________________

    Contemplant fièrement le soleil couchant qui inondait d'une lumière de sang la vallée de Connal, Zgavier se tenait à l'entrée de la tente d'Olaf, le chef des Vanirs, dont il brandissait par la tignasse rousse la tête fraîchement tranchée. Il comptait bien ramener ce trophée à la belle Riona du village du Clan de Brandock. Son exploit lui vaudrait bien d'obtenir les faveurs de la fille du Chef Torim ainsi que la bénédiction de son père. C'était d'ailleurs, hormis le plaisir de faire couler le sang, sa seule motivation. Sa croupe est si...

    Euh la croupe de Riona, pas son père...ok?

    Le jeune Aquilonien secoua la longue chevelure brune qui trahissait le sang cimmérien qui coulait en lui et rajusta la peau de Warg qui couvrait ses puissantes épaules.
    “Zgavier..”
    Le jeune conquérant, intrigua, se tourna sur lui même, achevant au passage un blessé Vanir qui n'en finissait pas d'agoniser.
    “Mais d'où vient cette douce voix?...Par Crom...Je serai prêt à sacrifier ma masse pour que la jolie Riona m'appelle de la sorte!”
    “Hou, Hou, Ma colombe, où te caches tu? Viens voir ton héros!”


    Mais...l'univers de Zgavier se mit tout doucement à basculer..Il sentit son être baigné par une force aussi inconnue que bienfaisante...
    Mais plus il sentait ses forces refluer en lui, plus les montagnes cimmériennes se fondaient dans l'eau turquoise..
    Et cette voix qui l’appelait...Cette voix..Mais c'était celle de ...

    “Petit blondin pisseux!”

    Les mots avaient jailli de la bouche de Zgavier avant même que celui ci n'ait encore ouvert les yeux.

    Se risquant à soulever une paupière, le conquérant observa ,incrédule, son grand frère Himp qui se tenait au dessus de lui.

    [/RP]

    ...à suivre....
    Last edited by Himp; 23rd September 2013 at 19:20.
    La ballade de Himp

    Vous aimez, ou vous n'aimez pas mes chroniques? N'hésitez pas à m'envoyer vos commentaires par MP!

  5. #5

    Default

    Partie 5
    [RP]
    “Ce bon vieux pisseux... Par Crom! Comment un tel avorton a pu atterrir en ces contrées dépourvues de la moindre bibliothèque! Je ne vois qu'une explication à ce phénomène... Je suis mort, c'est ça? Et les divinités des enfers m'envoient ton souvenir pour escorter mon âme jusqu'à mon dernier séjour...”


    Bras ballants, épaules basses, Himp secoua la tête, découragé.
    « Et voilà comment je suis récompensé à l’exécution de ma première “vague de vie” réellement efficace... »
    se murmura t'il dans un souffle désespéré.

    Il devait se faire une raison...Son frère était resté le même barbare décérébré qu'avant...
    A peine commencée, cette aventure lui tapait sur les nerfs...
    Himp s'éclaircit la gorge et, dit d'un air tant ironique que déconcerté...

    “Moi aussi je suis content de te revoir petit frère...et..., non, tu n'es pas mort! Je suis venu t'arracher à un destin funeste, et sache que je viens de soulager les douleurs que le naufrage t'avait occasionnées et que j'ai restauré tes forces...”

    Sans même écouter Himp, Zgavier s'assit lourdement sur le sable. Sa tête lui faisait aussi mal que le jour où il s'était risqué à boire d'un trait la stout de Gwingwen, l'un de ses vieux instructeurs de masse à deux mains. Mais la plus monstrueuse des migraines n'aurait pu endiguer les flots d'hilarité que son frère, comme à son habitude, lui inspirait.

    “Quoi! C'est toi que l'on a envoyé pour me sauver ?... Laisse moi rire ! Qui va te sauver, toi, à présent ? Moi qui me croyais mort... Tu parles... avec toi dans les pattes, c'est plutôt maintenant que je devrai commencer à m'inquiéter sérieusement pour ma survie!”

    D'un bond, le conquérant se releva de toute sa haute taille et, sans même un mot, attrapa Himp, le leva à bout de ses puissant bras au dessus de sa tête, fléchit ses cuisses hypertrophiées, et

    « désolé frangin ! »

    le jeta de toutes ses forces en travers du chemin de deux pirates ivres qui titubaient dans leur direction. Zgavier, faisant preuve de sa délicatesse habituelle, se rua sur les pauvres ivrognes et leur trancha la gorge avec un tesson de bouteille qu'il venait de ramasser.
    Repérant un demi-douzaine de pillards qui montraient, semblait-il des prédispositions à prodiguer aux deux frères un comité d'accueil à la façon Barracas, Zgavier préféra opter pour un repli stratégique. Il remit son frère sur pied. Himp, s'époussetant rageusement, la bouche pleine de sable, pesta :
    “Je t'avais dit que je ne voulais plus jamais que tu me fasse un coup pareil! A chaque fois qu'on est en danger, il faut toujours que tu me traite comme un vulgaire rondin! La prochaine fois, on établit un plan de bataille!”

    Zgavier, sans un mot,se précipita à couvert dans la végétation épaisse de la jungle tropicale. Himp, toussotant, les yeux plein de larmes suivit tant bien que mal son frère.
    Le conquérant se déplaçait avec l'aisance d'une panthère picte, à peine surpris de constater combien ses forces lui étaient revenues après les épreuves qu'il venait de traverser.

    “Allez, mon vieux pisseux, fais un effort! Tu t'es encore pris les pieds dans ta cape! Et par pitié ne touche pas à cette plante...”
    Trop tard...
    Les oreilles vrillées par le hurlement de douleur de Himp, Zgavier acheva :
    “...Ses feuilles sont particulièrement urticantes...”

    Les deux frères avaient quitté la piste et se trouvaient désormais sur un chemin de pierres noires lequel, si il ne portait aucune indication sur l'endroit où il menait avait le mérite d'être un peu plus dégagé de la végétation luxuriante qui étouffait l'île.
    Laissant son regard vagabonder au sud de la route sinueuse, Himp aperçut au loin les remparts composés d'un assemblage de rondins mal dégrossis qui, pour la région devait représenter un véritable chef d’œuvre de menuiserie.
    Mais qu'avaient érigé les habitants de la ville aux pieds du fortin ?Le jeune prêtre plissa les yeux en tâchant de distinguer ce que les piquets de bois fichés dans la terre portaient..
    Quel spectacle repoussant !
    Décidément les gens du coin n'avaient absolument aucun goût en matière d'aménagement des espaces verts. Certes, Himp tâchait de n'avoir aucun préjugés sur les us et coutumes autochtones, mais il fallait bien convenir que les corps empalés et putréfiés de pictes ne correspondaient pas exactement aux critères de décoration du jeune prêtre.
    Zgavier, en apercevant ce détail fut beaucoup plus enthousiaste.

    « Regarde-moi ces magnifiques nains de jardin, mon vieux Himp! J'ignore le nom de cette cité, mais sa façon de traiter sans détour la question de la surpopulation des pictes correspond tout à fait à mes convictions ! Cette balade m'a donné soif... Je propose que l'on aille arroser nos retrouvailles dans une des tavernes de cette bourgade... Tu as de l'argent, j’espère?”

    Le regard que Zgavier lança à son frère lui ôta toute envie de taire l'existence de la bourse gonflée d'argent que Himp portait à la ceinture.
    Observant les alentours, le conquérant agita la main en direction de son frère.
    Obéissant à un code qu'il croyait relégué aux oubliettes au même titre que le doudou en peau de Warg de son enfance, Himp, à contrecœur dégrafa la lourde bourse et la déposa dans la pogne de son frère qui la fit disparaître dans un des replis secrets dont les pantalons de Zgavier étaient toujours abondamment pourvus.


    Et c'est ainsi que le conquérant et le prêtre délesté de sa bourse reprirent leur route sous le soleil aveuglant de la ville. Zgavier maintenait une allure soutenue. La route était encore longue et les abords de la jungle assez touffus pour y camoufler d'invisibles dangers.
    Zgavier marqua une pause. Ses yeux fouillaient les moindres recoins. Il posa sa large main sur l'épaule de son frère

    « On n'est plus tout seul, petit frère.. »

    Himp raffermit sa prise sur le morceau de rame qu'il s'entêtait à traîner avec lui.

    « Tu veux dire que nous allons de nouveau avoir le déplaisir de nous faire attaquer par ces pirates puants ? Ces gens n'apprennent donc-ils jamais de leurs mauvaises expériences ?»

    Zgavier était immobile. Il s'était emparé d'un énorme morceau de bois et se tenait à l'affût aussi silencieux et impressionnant qu'un loup alpha de Cimmérie.
    Himp, sentant combien le moment était grave et que leurs vies dépendaient des leur rapidité de réaction et leur faculté d'adaptation.
    S'accroupissant,le prêtre se mit à tracer dans la poussière du chemin.
    « Bien. L'heure n'est pas aux actes irréfléchis et désordonnés. Je suggère que nous nous organisions avec méthode et coordination. Alors... La cité se trouve là... Nous sommes ici,et... Zgavier ? ZGAVIER ! »

    Se relevant aussi promptement que si il avait un rampant venimeux aux trousses, Himp se précipita à la suite de son frère qui se tenait au milieu de trois pirates dont les intentions étaient tout sauf pacifiques.

    « Et mon plan de bataille alors ? »

    Virevoltant entre ses assaillants abrutis par l'abus de rhum et l'absence totale d'une hygiène de vie digne de ce nom, Zgavier se battait avec fureur et, il n'aurait pas été faux de dire qu'il éprouvait un certain plaisir à cet exercice.
    Le conquérant asséna un terrible coup sur le crâne pouilleux du dernier encore debout qui roula aux pieds de Himp.
    Horrifié, Himp ne put détacher ses yeux de la calotte crânienne ouverte qui glougloutait comme l'intérieur du chaudron de la cuisinière des Enfers.
    La terreur planta ses griffes plus sûrement encore dans le cœur du prêtre quand la créature agonisante lui agrippa le pied.

    « Ma tête...J'ai mal...Aidez moi...Par pitié.. »

    Par Mitra, comment ce pirate pouvait être encore en mesure de parler alors que sa cervelle était à nu et que son œil droit pendait sur sa joue semblable à une larme immonde?
    Ce globe oculaire qui roulait en direction de Himp à la façon du plus obscène des clins d’œils, fut le détail de trop pour le si paisible étudiant spécialiste des langues anciennes de l'université de Tarantia.
    Son esprit avait franchi trop vite les échelons visqueux et empoisonnés qui menait successivement du dégoût à la panique, de la panique à l'horreur pure sans marquer aucun palier de décompression.
    Le sourire aux lèvres, Himp se pencha avec sollicitude vers le blessé.

    « Je suis un prêtre de Mitra, c'est ma vocation de te soigner. »

    Et le jeune homme enfonça de toutes ses forces sa rame sur la tête du pirate.

    « Ho, Pisseux ! C'est pas le moment de faire la sieste ! »

    Zgavier se tenait au dessus de son frère qui semblait vouloir faire corps avec les pierres du chemin.

    « Qu'est ce que je viens de faire là? Qu'est ce que je viens de faire là? Qu'est ce que je viens de faire là ?... »

    Le jeune homme brun souleva sans effort Himp et le remit sur pied.

    « Je te rappelle que c'est toi le soigneur de la famille, pas moi ! Ne compte pas sur moi pours à te sauver les fesses à longueur de temps et à veiller sur toi quand tu as tes vapeurs de jeune fille ! »

    Himp ,encore étourdi, décida de ne pas prêter attention aux reproches de son frère. Il faut dire que depuis le temps, il avait développé une capacité précieuse à reléguer tout discours émanant de son frère au niveau d'un fonds sonore auquel il ne fallait pas prêter attention.
    Mais, quand Zgavier déclara

    « Je dois quand même te dire que j'ai bien aimé ta façon de guérir de façon définitive ce tonneau de rhum ambulant »

    Himp ne put réprimer un petit sourire satisfait.

    Les deux frères reprirent leur route, suivant les méandres du chemin de pierres qui leur réserva quelques embûches, histoire de rompre la monotonie du trajet.
    Au grand désespoir de Himp, aucune de ses savantes stratégies, avec schéma tracés dans le sable à l'appui, ne furent adoptées par son frère.
    Zgavier préférait se ruer sur leurs assaillants comme un enfant se précipitant sur ses cadeaux de solstice d'hivers, mais appréciait l'aide et les soins que Himp tentait d'apporter avec plus de bonne volonté que d'adresse.
    Zgavier s'engagea sur un pont de bois franchissant un fleuve de lave dont la chaleur cuisait visage en sueur de Himp d'une façon tout à ait inconfortable,
    Emboîtant le pas de Zgavier, Himp s'engagea sur le fragile édifice dont la durée de vie semblait dépassée depuis un moment et qui ne tenait que par la force de l'habitude

    “Un pont en bois au dessus de roches en fusion...Ils sont complètement inconscients par ici!”

    Les deux Aquiloniens arrivaient enfin en vue des portes de la cité.
    Les pieds meurtris de Himp volaient en direction de la bassine d'eau chaude qu'ils ne manqueraient pas de dégoter une fois à l'abri des remparts
    La progression du prêtre fut violemment
    remise en question par le poing de son frère qui s'était emparé de sa cape et qui la tenait aussi fermement qu'il l'avait tenu sa bourse (heu...d'or, soit bien entendu hein?).

    “Zgavier. Je peux plus respirer... Tu es pénible... Moi qui pensais que ta manie de me tourmenter t'aurais passé avec l'âge...”

    Le conquérant toisa le petit prêtre de toute sa hauteur.

    “Tu ferais mieux de m'écouter si tu veux survivre...Tu es toujours aussi pleutre et lâche que dans mes souvenirs!”

    L'épée à deux mains du Roi Conan même ne serait pas parvenu à briser l’épaisse couche de glace haineuse qui s'était soudainement dressée entre les deux frères.
    Le conquérant désigna du doigt la silhouette d'un homme vêtu seulement d'un tablier de forgeron qui taillait à grands coups de marteau et de burin des pierres. A côté de lui s'élevait un mur en construction.
    Puis regardant les fers d'esclave qu'il portait toujours à ses poignets,

    «  Je vais avoir besoin de cet homme, ces bracelets sont trop voyants à mon goût. En plus, ils sont vraiment pas à la dernière mode Stygienne... »
    [/RP]
    .....à suivre...
    Last edited by Himp; 23rd September 2013 at 19:21.
    La ballade de Himp

    Vous aimez, ou vous n'aimez pas mes chroniques? N'hésitez pas à m'envoyer vos commentaires par MP!

  6. #6

    Default

    Partie 6

    [RP]
    Certes, celui qui s’était avéré être le forgeron de la ville s’était montré incroyablement précis et habile et, il fallait convenir que les stygiens ne seraient jamais fichus de fabriquer un acier aussi solide que celui des fondeurs de Cimmérie. Cela arrangeait bien les affaires de Zgavier.
    Mais, quand il s’était enfin décidé à poser son poignet sur la lourde enclume, le conquérant avait senti pendant quelques instants le doigt squelettique de l’angoisse lui caresser l’échine d’une façon bien trop familière à son goût.
    Il du reconnaître que ce forgeron gigantesque à la peau cuivrée et aux yeux enflammés s’était montré presque effrayant quand il s’en était pris aux fers, comme si ces derniers lui étaient une offense personnelle...
    La voix chaude et cuivrée résonnait encore aux oreilles de Zgavier :

    « Je déteste voir un homme vendu et réduit à la même valeur qu’un objet ou un animal. »

    « Bien... Encore un à qui je devrai cacher deux trois bricoles de jeunesse... »

    S’était dit le conquérant en lorgnant son frère qui discutait avec l’artisan comme si il s’agissait de la première personne qui faisait preuve de bienveillance à leur égard depuis leurs retrouvailles…
    Euh… A la réflexion... C’était bien le cas, non ? Cela valait certainement la peine que Zgavier laisse traîner une oreille nonchalante en direction des deux hommes.
    La voix chaude et grave du forgeron dominait sans peine la tonalité flûtée de Himp.
    Le contraste était saisissant et pas franchement en faveur du jeune prêtre

    « Par Crom, Pisseux n’aurait-il donc jamais mué ? »

    Les mots coulaient comme une rivière de cuivre en fusion de la bouche du forgeron

    « Vous voyez cette homme en uniforme là-bas à l’entrée de la ville? Adressez-vous à lui, dites-lui que vous venez de la part de Turack. Malgré son uniforme, c’est un de mes amis, il vous laissera entrer dans la ville de Tortage. Mais je dois vous prévenir, vous avez intérêt à vous faire très discrets, les soldats de la Main Rouge ont tout investit et font régner la terreur… Voilà qui est fait ! Bon de mon côté j’ai encore beaucoup de travail… Allez ouste ! »

    Malgré les efforts du mâle conquérant pour afficher une virile indifférence face à la façon un tantinet brutale qu’avait eu Turack de lui caresser les poignets, Zgavier ne pouvait s’empêcher de frotter les traces endoloris que ses fers d’esclaves lui avaient laissées en guise de souvenir.
    Après avoir salué le forgeron, il s’engagea sur le chemin qui menait vers la ville.
    Tortage... Jamais entendu parler... Nul doute que la cité saurait accueillir l’aquilonien comme son fils favori de retour au bercail !
    Le conquérant fut tiré de ses rêves de ripailles et de débauches par le bruit de plus en plus agaçant des bottes de Himp qui traînaient plus qu’elles n’avançaient sur les pierres du chemin.

    « Himp, ce n’est pas exactement le moment de composer un herbier... Sans vouloir te froisser...
    Tu voudrais pas faire évoluer ton arrière train plus vite ! »


    Himp leva ses yeux gris en direction de son frère

    « J’aurai bien aimé discuter un peu plus avec cet homme... sa façon de nous congédier... a été plus que sans détour…
    « Ouste ». Je croyais ce mot réservé aux enfants, ou aux petits chiens... »


    Zgavier préféra conserver un silence prudent. Quand son frère était dans cet état, il était capable du pire... de pleurer même...
    Mais, ne manifestant pour le moment aucune velléité à l’incontinence lacrymale, Himp poursuivit d’un ton professoral :

    « Tu as entendu Zgavier, cet homme nous a demandé d’être DISCRET, c’est un mot nouveau pour toi... ça veut dire… »

    Himp s’arrêta subitement, ne terminant pas sa phrase, ce qui inquiéta au plus haut point son frère.
    Le jeune prêtre avait il vu un danger ? Etait-il sur le point de sombrer dans une crise de sentimentalisme aigue ? Le cœur de Zgavier commençait à s’emballer quand le prêtre reprit d’une voix aigüe .

    « Oui, c’est bien ça! Regarde là haut ! Mon cher Zgavier je te présente le temple de Mitra en construction de Ninus !
    Rend toi compte c’est le passage que m’a fait traverser l’archichancelier ! C’était incroyable, c’était la première fois que je traversais un portail des voix de Mitra...Je ne sais pas si tu en es digne mais je vais te faire visiter ce sanctuaire !… »


    Jetant à peine un coup d’œil au tas de pierre qui mettait son frère dans tous ses états Zgavier poursuivit résolument sa route montrant du doigt les portes de la Ville.

    « Rien à foutre frangin, moi c’est CA que je compte visiter. C’est pas dans ton fichu temple que je vais trouver des femelles et de la binouze !
    En route, allons voir ce garde…Il a intérêt à nous laisser passer, je suis à bout de nerfs ! »


    Mettant en application les recommandations de Turack, Himp et Zgavier franchirent relativement aisément la lourde porte à herse métallique. Si les humains ne posèrent aucun problème, la cape de Himp excita la fureur des molosses des gardes et l’hilarité de leur maîtres, ce qui s’avéra, au final le meilleur des passeports
    Et la herse, semblable à une rangée de chicots rouillés, fut levée en l’honneur des deux frères par un mécanisme faisant un bruit venu tout droit des enfers....
    Ce n'était pas vraiment la façon la plus discrète d'entrer, mais ils y étaient arrivés !

    L’atmosphère de la cité, empli du parfum des épices, bariolé et vibrant des cris des marchands des vociférations des courtisanes n’avait plus rien à voir avec la jungle silencieuse qui étouffait les alentours.
    Himp, qui n’avait quasiment jamais quitté la blanche cité de Tarantia n’avait rien vu qui puisse le préparer au spectacle bruyant et coloré qu’offrait Tortage.
    Zgavier, quant à lui arborait le sourire du Warg qui vient de tomber sur une congrégation de lapins suicidaires. Au milieu de cette population de trafiquants et de marins, dont certains n’affichaient pas complets côté bras ou jambes, le conquérant était enfin dans son élément.
    La découverte de la taverne de la cité qui répondait au doux nom de«chien pinté » manqua de lui arracher une larme de bonheur.

    « La vache ! Je suis trop sensible ! Allez viens frangin, il est temps que nous célébrions dignement nos retrouvailles ! »
    Comprenant qu’il n’aurait pas voix au chapitre et que l’évocation de son allergie à la fumée des narguilés ne serait pas un argument recevable, Himp se résigna à entrer à la suite de Zgavier dans la gargote sombre et enfumée.
    Ses yeux clignant s’habituèrent à la pénombre. Des bancs et des tablées crasseuses emplies de marins ivres, certains braillant des chansons à boire emplies de mots que Himp n’avaient jusque-là lu que sur les murs des latrines des auberges d’étudiants
    Contournant les corps secoués de ronflement des clients qui dormaient à même le sol, Himp suivit Zgavier qui, de ses larges épaules, se frayait un chemin en direction du comptoir.

    « Tavernier ! Deux pintes pour deux frères qui reviennent de loin ! »

    Himp, se hissa aux côtés de son frère.

    « Un lait de chèvre eut fait l’affaire… »

    Le prêtre n’apprécia que moyennement le regard complice que Zgavier et le tavernier s’échangèrent avant d’éclater de rire.
    C’est un monde tout de même ! Ce n’était pas parce que Himp était investi d’une quête qu’il devait sacrifier à tous les clichés de l’aventurier !
    Zgavier empoigna l’épaisse chope en bois tourné et la brandit en direction de son frère.

    « Trempe tes lèvres là-dedans! Et t’inquiète pas pour les microbes… Y a assez d’alcool pour désinfecter les derniers survivants ! »

    Himp se hasarda à goûter. Bon...Une fois l’impression de boire de l’huile de roche, le breuvage n’était pas si mauvais après tout...

    « Ça ne vaut pas le lait de chèvre, mais c’est pas mal... Bon... Crois-tu que l’on puisse discuter dans un coin discret ? »

    Zgavier, dont les regards sondaient sans succès les profondeurs de la taverne dans l’espoir de trouver un peu de compagnie féminine soupira.
    Himp avait décidément le chic pour casser l’ambiance.

    « Allez, viens par là et explique moi un peu pourquoi, par Crom, il a fallu que l’archichancelier de Tarantia te colle à mes chausses ? »

    Himp rassembla ses esprits, un peu étonné et déstabilisé par l’idée que son frère fut prêt, pour une fois, à le laisser parler, et, encore mieux…à l’écouter.

    « Euh… alors…tu sais…je sais pas trop par quoi commencer… »

    « Par le début ! Pardi ! Et ne soit pas trop long, je me sens la patience d’un rampant affamé ! »

    L’interrompit Zgavier.

    Himp énonça le peu d’information dont il disposait pour l’instant, soulignant avec insistance l’importance vitale de leur destinée, le monde à sauver, tout ça …, tout ça…, même s’il n’avait pas la moindre idée des tenants et des aboutissants de ce qu’avait distillé l’oracle.

    «… C’est Mitra en personne qui nous mandate, nous devons suivre à la lettre ses instructions …bref, notre comportement doit être exemplaire, le monde barbare et civilisé dépend de nous ! Nous devons regagner par n’importe quel moyen Tarantia la Vieille, et je n’ai aucune idée de l’endroit où l’on se trouve. »

    Zgavier ne put masquer le trouble qui s’emparait de lui. Il craignait par-dessus tout la magie, les Dieux, les oracle... Alors qu’il était de naissance Aquilonienne, la plus grande partie de son éducation était Cimmérienne… et les Cimmérien ont une peur bleue de la chose magique et divine. Il se sentait comme pris au piège… Surtout ne contrarier les Dieux pour rien au monde…Cependant, la vanité et l’orgueil pris le dessus sur sa crainte. Sauver le monde signifiait gloire, notoriété et immortalité. Dans mille ans on parlerait encore de lui, les vieux, les enfants et surtout les femmes !
    Bref… il n’avait pas le choix…

    Zgavier se dirigea en titubant légèrement vers le comptoir.
    Il éprouvait le besoin vital de prendre un remontant à la hauteur de ce qu’il venait d’entendre.

    « Tavernier! Sers-moi ce que tu as de plus fort et lésine pas sur la quantité! J’ai de quoi te payer et une espérance de vie qui vient tout juste de se diminuer ! »

    L’homme, un chiffon immonde à la main était, semble t’il occupé à enduire son comptoir d’une couche supplémentaire de crasse.

    « On dirait que tu viens de croiser Seth en personne ! On peut savoir ce qui plonge un gaillard comme que toi dans un tel état ? »

    « On ne peut pas dire que ma journée se soit passée exactement comme je l’avais espérée… Alors sois gentil, sers-moi et épargne-moi tes bavardages de comptoir. Une fois que j’aurai le gosier rincé, peut être que je serai plus causant... »

    Le tavernier n’insista pas et, en silence, servit Zgavier. Sans demander son avis, il remplit également la chope de Himp qui tanguait plus qu’il ne marchait en direction du comptoir.

    « Alors jeune homme, vous avez l’air d’être un connaisseur, vous appréciez les spécialités locales ? »

    Le jeune prêtre avait bu davantage ce soir que dans tout le reste de son existence. On pouvait presque distinguer des bulles de stout pétiller dans ses yeux.

    « Par Matra...Par Mitra...Cette tisane à base de céréales et d’eau pure est un reg...hic...un régal! Mais…dites m..moi mon brave…comment regagne t’on Tarantia la Vioc..la Vieille? Je vous prie …N.. . nous avont une mission cap…capitale »

    Tenta de dire un Himp titubant, levant son index en direction de son nez en trompette en un geste qui, s’il se voulait auguste, s’avérera ridicule entre le bafouillage d’ivrogne et la morve gélatineuse coulant de ses narines dont il avait finalement perdu tout contrôle.

    « CAAAPIIIITALLLEEE ! … mon Brave !»

    Répéta-t’il.

    Aussi étonnant que cela puisse paraitre, le tavernier ne sembla pas le moins du monde impressionné par la prestance du Prêtre. Il lui répondit tout de même d’un air négligeant :

    « Mes pauvres amis, la ville est sous blocus de la Main Rouge. Partir d’ici risque de ne pas être aisé. »
    Puis baissant la voix
    « Mais vous pouvez tenter discrètement de vous adresse à l’un des armateurs qui compose ma noble clientèle. Peut-être que l’un d’entre eux a prévu une échappée nocturne et clandestine….mais je ne peux rien vous promettre… d’ailleurs, je ne vous ai rien dit… »

    Le visage de Zgavier se décomposa visiblement. Blanc comme la toge d’une pucelle vestale, la bouche tremblante et balbutiante, il bafouilla :

    « Un… un armateur… qu’est-ce que t’entends par là tavernier ? Tu veux dire que… »

    Le tavernier répliqua sans ciller :

    « Un armateur quoi, le capitaine d’un navire marchand, histoire de pouvoir quitter l’île! »

    « L‘île? Quelle île? On est sur une île ? Non, ça va pas recommencer ? Je…. »

    Vous avez sans doute entendu parler des énormes condors du Pointain qui peuvent fondre sur un bœuf et, dans leurs monstrueuses serres, l’emporter vers leur repère en broyant sa cage thoracique et sa colonne vertébrale. Vous avez sans doute également sans doute entendu parler de ces mignons petits rongeurs gambadant dans les champs de blé que l’on nomme campagnols d’aquilonie. Ce que l’on sait moins, c’est que lorsque ce charmant petit mammifère des campagnes entend le cri du condor, sa terreur est telle qu’il s’évanouit instantanément, les quatre fers en l’air. Cet état de fait induit que, alors que ce rapace base toute sa vision de prédation sur les mouvements de ses proies vues du ciel, que jamais, au grand jamais il n’a mangé un seul campagnol d’aquilonie. De toute façon ils sont bien trop petits pour intéresser un oiseau d’une telle taille…
    Et bien, tel le campagnol d’aquilonie au cri du condor, Zgavier sentit ses jambes se dérober sous lui, un voile noir s’abattit devant ses yeux

    En effet, au risque de trahir ici un de ses secret les plus honteux, il convient de révéler que Zgavier nourrissait depuis sa plus tendre enfance une phobie absolue et irraisonnée de la chose marine, renforcée par sa récente croisière plus qu’imposée par le dénommé Sadur avec, à l’issue, un baptême de brasse coulée des plus catastrophiques.

    Bref, l’émotion fut trop grande et, tel un séquoia géant s’abattant à grand fracas sur le toit d’une ferme, Zgavier perdant connaissance s’effondra en arrière de tout son long. Il entraîna dans sa chute une table qui, sous le poids de sa solide carcasse, se retourna violemment et telle une catapulte, envoyant dans les airs les pichets, les choppes pleines de bière et autre miches de pain qui se trouvaient dessus. Furieuse, la distinguée clientèle protesta en vain… Zgavier gisait inanimé sur le plancher crasseux, baignant dans son vomit…

    A la différence du campagnol, cet état de fait ne changeait rien à sa condition. Tôt ou tard, il lui faudrait bien affronter sa peur et monter sur un navire pour quitter l’île…[ /RP]
    …A suivre…
    Last edited by Himp; 28th September 2013 at 21:11.
    La ballade de Himp

    Vous aimez, ou vous n'aimez pas mes chroniques? N'hésitez pas à m'envoyer vos commentaires par MP!

  7. #7

    Default

    7ème partie


    [RP]La galère avait levé l’ancre depuis déjà une bonne heure et son étrave fendait vaillamment les flots bleus des mers des Barracas.
    C’est un émerveillement de constater combien, au fil du temps,les peuples d’Hyboria avaient su être prolifiques et ingénieux en matière d’architecture navale :Les felouques fuselées de Khémi, les puissantes goélettes de Messantia constituaient de véritables chef d’œuvre d’art nautique à la renommée universelle.
    Cependant, il arrive même aux plus grands concepteurs d’être parfois touchés par le manque d’inspiration, et, l’esprit créatif des nobles peuples d’Hyboria avait sérieusement manqué d’inspiration au moment de la conception de notre galère.
    La silhouette pataude du rafiot évoquait irrésistiblement ces insectes aux pattes multiples qui se propulse sur l’eau. Sa coque aurait bien eu besoin d’un coup de peinture et la tête de dragon borgne et édentée qui faisait office de figure de proue ne tenait que par la force de l’habitude.
    La voile délavée et rapiécée trahissait le nombre incalculable de tempêtes qu’elle avait essuyés.
    Ceci étant dit, l’équipage ne valait guère mieux.
    Le hasard s’était amusé à confectionné une sorte de patchwork humain bigarré et pas de meilleur goût en prenant soin de ne sélectionner uniquement ce qu’ Hyboria avait engendré de pire en matière de rebut provenant d’horizon différents.
    Ce fatras de marins d’eau douce avait résolu une fois pour toutes le problème de leur différence en adoptant un langage universel qui avait fait ses preuves : celui du coup de poing.
    De toutes façons ,aux galères, il n’y avait qu’une seule chose qui comptait : la capacité à ramer en cadence et à faire le gros dos quand le chef de pont éprouvait l’irrépressible envie de se dégourdir les pognes.
    Les rameurs partageaient, en dépit de leurs légères divergences ethnoculturelle, un air de famille qui aurait pu être touchant à ceci près que cette expression était due à leur envie commune de faire la peau au dormeur qui piquait un roupillon au milieu du pont, affalé dans les cordages sans être le moins du monde incommodé par les effluves de poissons crevé qui en émanaient.
    Un observateur attentif , (et encore, pour ce faire, aurait-il fallu dégoter un érudit suffisamment inconscient pour souhaiter étudier ce ramassis de hors la loi tous plus effrayants les uns que les autres) aurait remarqué que le rameur qui dardait les regards les plus meurtriers en direction de l’insouciant assoupi était un jeune homme blond aux yeux gris et dont les mains blanches étaient déjà mises à mal par les bois de la rame qu’il avait l’impression de tirer depuis sa naissance.
    Le chef de pont se planta devant le rameur blond.
    Sa cape noire rendait rendait plus impressionnante encore sa barbe qui flamboyait, aussi rouge que le derrière d’un démon.
    « Hé toi, va secouer un peu ton frangin ! Un costaud pareil, ce serait dommage qu’il ne profite pas de l’occasion pour faire de l’exercice en admirant le paysage ! »

    Himp, tout courbaturé, suivit le chef de pont dont la démarche chaloupée et assurée était un véritable raillerie à l’encontre des déplacements hasardeux du prêtre. Était-ce sa faute à lui, Himp, si par on ne sait quel caprice des dieux nautiques, les épais cordages qui traînaient sur le pont avaient choisi de se lover amoureusement autour de ses chevilles?
    Tant bien que mal, Himp s’approcha de son frère, le visage serein de Zgavier reposait juste au dessous de lui.
    Les rameurs jetèrent un coup d’œil en coin à la scène.
    Les côtes d'Argos que la galère longeait afin de rallier avaient mis des siècles à composer avec soin un paysage en l’honneur de la monotonie et de l’ennui.
    Et, dans l’univers plutôt exigu qui était celui des marins sur la galère, les spectacles étaient rares..
    Sûr que le prêtre allait lancer quelques sorts qui seraient du plus bel effet..
    Afin de ne pas perdre une miette, les galériens ralentirent insensiblement l’allure..
    Le cœur des rameurs battaient au rythme des pas de Himp qui s’avançait en direction de l’endormi..
    Malgré leurs balafres et leurs mines farouches, les marins ne purent s’empêcher d’échanger des regards affolés
    Heu..ils n’étaient pas des experts, mais cette façon d’invoquer à grands coups de pieds et de jurons..c’était plutôt inhabituel de la part d’un prêtre de Mitra, non ?
    Himp, le nez plus retroussé que jamais, secouait de plus en plus furieusement son frère.

    « Pour quelqu’un qui n’apprécie pas les balades en mer, tu as trouvé le meilleur moyen de voyager ! »

    Zgavier entrouvrit un œil et sourit béatement.

    « Douce... prodigue moi tes massages les plus suaves.. »

    Himp se mit à marteler la poitrine de son frère

    « ce sont bien les seules caresses que tu sentiras avant longtemps !Par Mitra ! Tu es encore plus saoul qu’un cochon sauvage ! »

    Zgavier, la tête résonnant comme si toutes les trompettes de Jérida s’étaient mis d’accord pour faire de sa cervelle leur nouvelle salle de concert, s’assit pesamment sur les cordages.

    « Himp..Autant te le dire tout de suite, je n’apprécie que très moyennement ta façon de me réveiller..Faudrait pas que ça devienne une habitude ! »

    Une vague un peu forte fit tanguer la galère.

    Les yeux de Zgavier s’agrandirent.

    « Ha non ! Ne me dis pas que… »

    Himp haussa les épaules.

    « Si tu avais eu la délicatesse de ne pas écraser la mascotte de l’armateur le plus puissant de Tortage, un spécimen rare de Tarsier de Lémurie (je parle de la bestiole, pas de l’armateur !) quand tu t’es évanoui dans la taverne, nous ne nous serions peut être pas retrouvés embarqué sur sa galère ! C’est le seul moyen que j’ai trouvé afin de le dissuader de nous égorger. »

    Le visage de Zgavier, en harmonie avec la houle, changeait de couleur à chaque vague.

    «Bravo, je constate que tu es aussi doué en négociation qu’au combat !Et, ce serait trop demandé que de savoir où tu comptes nous amener ? »

    Himp baissa le nez

    « L’armateur pleurait tellement sur la mort de sa bestiole que je n’ai pas pu saisir quelle était notre destination.. Je n’aurai jamais cru qu’un costaud tel que lui contenait autant de larmes.. C’était horrible.. »

    « Quoi !Tu m’as imposé cette croisade puante et t’es même pas fichu de me dire où nous nous rendons !Je vais t’étriper ! »

    Zgavier tenta de se relever.
    A cet instant, une muraille d’eau un peu trop imposante pour être ridiculisé sous le nom de vague secoua durement l’embarcation.
    Le teint de Zgavier vira au gris.

    « Hiiiiimp..je me sens mal.. »

    Le prêtre se recula d’un bond
    .
    « Chef de pont ! J’exige que vous me reconduisiez immédiatement à ma rame ! Je ne resterai pas un instant de plus aux côtés de ce faux-frère ! »

    La lune s’était enfin décidée à percer les nuages effilochés qui zébraient le ciel.
    Zgavier, faible comme un lapereau nouveau-né, se décida enfin à quitter la cale qui faisait office de dortoir. Il abandonna sans regret la chaleur humaine au parfum viril un peu trop marqué qui accompagnait comme il se devait une tripotée de gaillards qui, malgré le fait qu’ils soient environnés d’eau n’auraient songé pour rien au monde à l’utiliser pour se décrasser un brin.
    Ses intestins ayant décidé de signer une trêve avec son estomac, Zgavier se hasarda sur le pont.
    L’équipe de nuit, réduite à une dizaine de galériens, faisaient clapoter en silence les rames dans une encre aussi sombre et calme que l’eau corrompue des puits de Fengdu.
    Des morceaux de brume se prenaient dans les cheveux des marins, les transformant, aux yeux du conquérant de façon fugace et désagréable, en fantômes effrayants.
    Zgavier frissonna. Cimmérien d’adoption, le conquérant avait une frousse bleue de tout ce qui était d’ordre surnaturel. Et ces écharpes de brume qui s’étiraient en volutes paresseuses autour des marins étaient toutes sauf normales, et cela n’était pas du tout au goût de Zgavier.
    Se déversant en bouillonnant, le brouillard enlaça plus étroitement encore les silhouettes des rameurs et recouvrit le pont.
    Soudain, Zgavier fut plongé dans un univers d’ouate totalement opaque et assourdi.
    « Splash ! »
    Non, il n’avait pas rêvé, Zgavier venait bien d’être éclaboussé..La sensation glaciale de l’eau salée sur sa peau était désagréable, mais plus désagréable encore était le bruit mouillé et sourd d’un poids atterrissant lourdement sur le pont...
    Aux aguets, Zgavier se déplaça furtivement. Désormais il était possible de discerner le sol glissant et visqueux d’un corps en mouvement de reptation sur le pont...
    Malgré la purée de pois qui lui obscurcissait la vue, Zgavier distingua l’ombre démesurée de ce qui ressemblait à un immense cordage s’élever au dessus des rameurs inconscients dans un chuintement soyeux et écœurant.,
    Le brouillard se fit plus épais..La nausée commença à se rappeler au bon souvenir de Zgavier..
    Le front ruisselant de sueur,retenant avec peine ses haut le cœur, Zgavier entendit à peine le cri de surprise vite étouffé par le bruit d’un plongeon invisible

    « Par Crom ! Je ne suis pas un navigateur confirmé, mais ça, ce n’était pas normal ! « 

    Comme à regret, la brume abandonna peu à peu le navire. Les rameurs manœuvraient en silence.
    Zgavier se frotta les yeux.
    La lune se reflétait sereinement en éclat de lumière sur les vagues sombres, le mouvement régulier et harmonieux des rames propulsait le bateau comme à l’accoutumée..
    Cette croisière s’annonçait plus pénible que prévu si son appareil digestif, non content de lui faire souffrir le martyre se mettait maintenant à lui provoquer des hallucinations...
    Redescendant dans la cale, Zgavier accueillit presque avec plaisir l’odeur musquée et les ronflements sonores du dortoir.
    Sur le pont, la lune était non sans mal parvenue à dissiper les restes de brumes.


    Setennu ramait sans discontinuer depuis la tombée du jour. Sa vieille cicatrice, souvenir d’une de ses bagarres de jeunesse dans les lointaines contrées de Kopshef s’était réveillé et lui faisait un mal de chien. Ce stygien qui ramait au banc n°12 n’était pas un mauvais bougre...Si il y mettait les formes, nul doute que Huy Lee l’approvisionnerait de nouveau en poudre de lotus...
    Ignorant la douleur qui lui poignardait les reins avec autant de vice qu’un assassin, Setennu se tourna vers le khitan dont il espérait le salut.

    « Mille putes borgnes ! »

    L’éducation de Setennu avait été plus que négligée par sa maquerelle de mère. Elle s’était davantage soucié du bien être des clients de son bordel que de celui de son vaurien de fils.
    Il fut par conséquent plutôt limité dans l’expression du sentiment d’incrédulité terrifiante que lui inspira la vision du banc de son camarade d’infortune désormais vide. D'étranges flaques visqueuses recouvraient la rame que seul le courant malmenait...

    « Assez roupillé bougre de feignants ! Il est temps pour vous de faire de l’exercice et de profiter de l’air pur ! »

    Himp souleva avec précaution la tête ébouriffée du barbare cimmérien qui s’était niché contre son épaule pendant la nuit. Au moins, le jeune guerrier avait eu l‘obligeance de ne pas baver sur la tunique du jeune prêtre...
    Le soleil rougeoyait comme un immense œuf à la coque prêt à être servi aux dieux en guise de petit déjeuner.

    « Comment peux tu seulement songer à mang... beurk ! »

    Himp regarda Zgavier qui détalait en direction du pont.

    « Je suis contente de voir que tu vas mieux. »

    Un jeune afghulien, qui semblait avoir été oublié le jour de la distribution des cous et dont la tête semblait directement vissé sur son torse démesuré secoua sa tresse noire.

    « C’est ton frère, c’est ça ? Fais lui boire une gorgée d’eau de mer ! Ca aide paraît-il.. »

    Himp leva un sourcil.

    « Je pense qu’il conviendrait que l’on attende de s’être éloigné de l’endroit où Zgavier vient de nourrir les poissons avant de le convaincre de boire de l’eau de mer .mais..C’est une excellente suggestion...Merci....Au fait, je m’appelle Himp, et à qui ai-je l’honneur ? »

    L’afghulien éclata de rire. Himp contempla avec appréhension les immenses épaules tatouées secouées par l’hilarité.

    «Par Mitra.. »Songea Himp « Mais que donnent les mères d'afghulie à leurs enfants pour en faire de tels monstres ! Espérons qu’il a fini sa croissance... »

    L'afghulien essuya ses yeux de jais.

    « Mais d’où tu sors toi! C'est une galère de correction, au beau milieu de nulle part et tu m'cause comme si on se trouvait dans un de ces foutus palais de Yuetchi ! »

    Assénant une grande claque dans le dos de Himp qui bafouillait, le barbare reprit.

    « Je m’appelle Colchghor et voilà des mois que je n’ai pas autant ri. ! Allez, ramène toi c’est l’heure de s'remplir l'estomac avant de vomir, et j'veux qu'tu me fasses encore rire.. »


    Partagé entre le soulagement d’avoir su se lier d’amitié avec un géant de plus de 2 mètres et un petit sentiment de vexation « je suis pas un bouffon, tout de même ! », Himp suivit Colchghor en direction du petit attroupement qui s’était formé autour du maître coq.
    Les épaules félines de l'afghulien présentait l’avantage d’exempter le barbare de la moindre bousculade. Himp se précipita dans son sillage.

    Penché au dessus d’un chaudron immense qui glougloutait de façon peu engageante, le maître coq, rouge gras et luisant comme le cochon que le malheureux équipage, condamné aux rogatons et épluchure ne se verrait jamais servir, faisait tourner son immense louche de cuivre au dessus de sa calotte grisâtre de cuisinier.

    « J’ai dit un par un et ramenez vos auges ! Même des vanirs seraient plus disciplinés que vous ! »

    Le cuistot n’avait cessé de pester et de fulminer quand ce furent à Colchghor et à Himp d’être servis.
    Le guerrier s’empara d’une écuelle dont les dimensions plus que respectables aurait du lui assurer d’être promu au rang de seau.

    « Chef..Sans ton joli sourire pour épicer ce ragoût, mon repas n’aura aucune saveur..Pourquoi, par Crom, es tu de si mauvaise humeur ? »

    Le maître coq essuya son front ruisselant, en profitant pour assaisonner d’une façon toute personnelle son ragoût.

    «Je vais te dire ce qui me chagrine...Cette nuit un des nôtres a une fois de plus été avalé par ce foutu brouillard nocturne ..  »

    Le cuistot de ses petits yeux porcins lança un regard venimeux en direction des marins affalés engloutissant leur ration.

    « Et ces ventre à patte, au lieu de s’inquiéter sur le sort de leur pauvre camarade, se soucient uniquement de savoir qui va pouvoir bouffer la gamelle du disparu! La dernière lune noire n’a pas été bonne fille...Les signes néfastes se multiplient, les abominations nous guettent..Mais on s’en fout, hein, du moment que ça nous permette de faire de la gratte sur la part du voisin ! »

    Himp qui, jusqu’alors tentait d’identifier les étranges morceaux, dont certains semblaient encore doués de vie , fixa incrédule le cuisinier.

    « Vous voulez dire qu’il existe des abominations pire encore que cette étrange mixture que vous comptez me faire avaler ? »

    Jamais une louche n’eut l’air plus menaçant qu’à cet instant même aux yeux de Himp.

    « J’ai pas le cœur à rire, l’avorton !Trois de nos hommes sont partis dans le brouillard avant que nous fassions escale a Tortage pour compléter notre équipage. Et, depuis la dernière lune noire,on me rapporte sans cesse des histoires terrifiantes de part et d’autre d’Hyboria...Tu vois le stygien assis tout seul dans son coin ? Avant c’était l’homme le plus joyeux des mers,on dirait pas, hein ?
    La dernière fois qu’il est rentré chez lui, au lieu d’un foyer aimant et prospère, il n’a trouvé que désolations et terre stériles. Depuis, il ne parle presque plus, et si on lui adresse la parole,il se met à jacter sans s’arrêter...On entrave que dalle à ce qu’il cause..Des fleuves qui brillent la nuit et qui charrient des cadavres, des oasis transformées en miroir..
    Aussi vrai que je suis le meilleur cuistot des mers des Barracas, je te le dis, blondinet, la dernière lune noire ne s’est pas montrée bonne fille,.. Tu sers Mitra, pas vrai ?Il serait temps que t’en touches deux mots à ton dieu, blondinet !»
    [/RP]

    ...A suivre...



    Zgavier vous a conconcté une petite musique et une tranche de nos vies animée afin d'illustrer nos aventures. Je vous invite visionner cela ici:
    La ballade de Himp
    http://www.youtube.com/watch?v=Q9l3g...utu.be &fmt=22
    SVP Passez en HD!
    Last edited by Himp; 10th October 2013 at 08:01.
    La ballade de Himp

    Vous aimez, ou vous n'aimez pas mes chroniques? N'hésitez pas à m'envoyer vos commentaires par MP!

  8. #8

    Default

    8ème partie

    [RP]
    Zgavier n’osait pas lever la tête hors des vagues.
    Depuis quand fallait-il être expert en sciences occultes pour confectionner le repas des matelots ?
    Beurk…
    Rien qu’à voir la tête dégoulinante de gras du cuistot, ça vous passait l’envie de grailler !
    Zgavier fut soudain tiré de ses réflexions philosophiques par les cavalcades mal assurées de son frère.

    « Cher frère..J’ai fait une rencontre fort intéressante... »

    Zgavier leva un regard de bovin que l’on emmène à l’abattoir.

    « Si tu viens me parler de nourriture, par Crom, je t’envoie rejoindre les restes de mon dernier repas ! »

    Himp, sur qui les remarques acides de Zgavier faisaient autant d’effet que le déluge sur une flottille de canards, se laissa glisser à côté du conquérant conquis par le mal de mer.
    De ce ton docte qui avait le don de faire hérisser le poil de son frère de manière aussi instantanée qu’irraisonnée, Himp déclara.

    « Par le biais de cette galère, notre destin est en marche, j’en ai la conviction ! L’archichancelier... Il ne s’est pas trompé... La prophétie est en train de se réaliser... »

    Zgavier qui jusqu’ici endurait les propos de son frère comme le promeneur surpris par l’orage attend patiemment la fin de l’ondée sous un feuillage, dressa une oreille presque attentive.

    « La prophétie ? Tu crois sérieusement à ce conte de nourrice? J’ai jamais eu besoin de Mitra pour trouver la prochaine taverne et lever une donzelle pas farouche ! »

    Himp, qui venait (enfin !) d’établir un lien de cause à effet entre les propos du cuisinier (qui lui avait nourri l’esprit à défaut de l’estomac) ne comptait pas laisser son frère sous-estimer la nature capitale, historique même du moment.

    « Je ne peux pas en vouloir à un barbare tel que toi de ne pas saisir les subtilités des travaux des érudits de Tarantia. Mais, les dieux seuls savent pourquoi, l’honneur t’es accordé de me seconder dans l’exécution de ma quête! Notre présence sur cette galère est une véritable béné…diction »

    Himp fut interrompu par l’arrivée du chef de pont qui s’exerçait à faire siffler son fouet en direction des deux frères.

    « Allez les gars ! Faudrait pas arriver en retard à votre séance de ramage matinale ! Rien de tel pour démarrer la journée ! ».

    Zgavier, s’appuya lourdement sur l’épaule de son frère, faisant totalement abstraction des couinements de protestation du prêtre.
    Himp grogna.

    « On ferait mieux d’y aller..Le chef de pont n’est pas à prendre avec des pincettes..Pendant que tu ronflais gentiment, un homme de l’équipage s’est fait enlever alors que le brouillard s’était abattu sur le navire… et... aïe ! Pourquoi tu me serres le bras comme ça ? »

    Zgavier se redressa, son regard devient perçant.

    « Alors... Ce n’était donc pas un rêve... Mais alors... Quelle était cette abomination que j’ai croisée sur le pont? Aouch ! »

    La caresse du fouet du chef de pont s’était abattue sur les larges épaules du conquérant.


    « Alors mes gaillards ! Boudez pas votre plaisir ! La rame, c’est l’avenir ! Vous verrez, un jour, y en a qui paieront pour être à votre place ! Hé, ho, douce.. »

    Il est toujours curieux de constater combien priver un homme de ses appuis terrestres lui ôte systématiquement toute velléité d’émettre le moindre trait d’esprit.
    Tenu fermement au col par un Zgavier furibond, le chef de pont tentait sans succès de rétablir son équilibre ainsi que sa dignité tout aussi chancelante..
    Le conquérant rapprocha le visage du chef de pont du sien et gronda.
    «Si tu tiens pas à ce que je rame avec ce qui restera de ton cadavre une fois que je me serai occupé de ton cas, faudrait voir à être moins entreprenant mon bonhomme... Autant te prévenir tout de suite, on sera jamais assez intime pour que je te laisse me caresser le poil ! »


    Sans un regard pour le malheureux second de bord qui tentait, malgré sa petite taille et sa chétive constitution de porter secours à son chef, qui gisait lamentablement sur le pont, le conquérant partit retrouver sa rame.

    « Finalement, ce vieux morse à poil roux avait raison, rien de tel qu’un peu d’exercice pour bien démarrer la journée ! »

    Durant toute la journée, l’ambiance sur la galère fut aussi lourde et plombée que les nuages lourds qui s’entassaient à l’horizon.
    Zgavier, malgré sa nature sceptique ne put s’empêcher d’être touché par les histoires que les rameurs s’échangeaient. Bien qu’il ait prétendu le contraire à Himp, le conquérant avait en tête les termes de la prophétie et, petit à petit, son esprit empruntait le chemin que son frère avait déjà parcouru….
    Et il ne fallait pas être un rat de bibliothèque à la tête farcie de mots anciens pour s’apercevoir que tous ces histoires abominables avaient un point de commun qui lui donnait des frissons dans le dos…
    Le Cercle Noir, origine de toutes ces abominations et point de départ de la prophétie...
    Le cimmérien d’adoption, comme à chaque fois qu’il se retrouvait plongé contre son gré dans les marais fétides de la sorcellerie ressentit le besoin d’agir.
    D’accord, il ne maîtrisait pas les sciences occultes, et ne pouvait pas grand-chose à la malédiction des Cercles Noirs, mais aussi vrai qu’il se nommait Zgavier, il y avait bien un monstre à dérouiller, non ?
    Zgavier jeta un regard agacé à ses compagnons de galère.
    Des grandes gueules quand il s’agissait de terroriser l’ophirien efflanqué qui faisait office de second mais il était évident qu’il ne vaudrait pas un pet de lapin face à la première chimère qui s’aviserait de pointer son museau…

    « Équipe du jou,r même les bonnes choses ont une fin ! Remballez vos muscles et laissez un peu la place à vos copains du soir ! A leur tour de s’amuser ! »

    Himp, Zgavier et Colchghor se retrouvèrent de nouveau à patienter devant le tonneau glougloutant du maître coq.

    « C’est prodigieux de constater que malgré le différence d’aspect et de couleur, le ragoût a l’air aussi nauséabond que celui de ce matin »

    Zgavier prit son frère à l’écart.

    « Bon..Je dis pas que je crois à ton tissus de racontars, mais j’ai remarqué deux trois bricoles la nuit dernière... »

    Les yeux de Himp s’illuminèrent

    « Je te l’avais bien dit ! Mitra nous a dévoilé notre destin ! Ho, ce ne sera pas facile mais... »

    Zgavier regarda son frère d’un air songeur.

    « C’est malheureux tout de même ce que l’abus de grimoires et le manque de femmes peuvent faire comme dégâts ! Maintenant tu m’écoutes, cette nuit, on va faire la peau à notre nouvel ami qui se cache dans le brouillard ! Il est temps qu’on se défoule un brin ! Le chef d’équipe a tort, il faut savoir diversifier les exercices physiques, on a assez fait de rame comme ça ! »

    « Heu...Ha bon... mais j’avais déjà réservé ma couchette, moi... »

    Semblable aux nuits précédentes, la lune vit sa lueur argentée peu à peu étouffée par les volutes malsaines du brouillard qui se répandait de façon insidieuse sur le pont.
    Une joie sauvage envahissait le cœur de Zgavier.
    Le conquérant avait troqué sa rame contre une gaffe aux extrémités acérées,
    Certes, l’outil de fortune ne constituait pas le parangon de l’armement tel que Zgavier pouvait l’imaginer dans ses rêves les plus fous, mais, il n’y avait pas moyen de trouver mieux pour l’instant.
    D’après Colchghor, les armes que les matelots possédaient avaient été confisquées par le second et remisées dans sa cabine...
    Le barbare avait secoué sa tresse brune avec dédain en évoquant l’être quasi fantomatique qui suivait le chef de pont à la manière d’un démon familier.

    « Il nous a dit qu’il fallait que l’on obéisse à des préconisations sécuritaires... Les gars et moi on a jamais eu à faire à des préconisations .Et on avait pas envie que ça commence... Alors on a pas cherché à discuter... On lui a fourgué nos canifs et nos cure dents... J’ai cru que les allumettes qui lui servent de bras allaient casser net sous le poids de l’acier ! A l’heure qu’il est, ce grippe-sous doit être en train d’évaluer combien la revente de notre matos pourrait lui rapporter… Qu’est-ce que tu veux attendre d’autre de la part d’un ophirien ! »

    Le frêle second étant pour l’heure claquemuré dans sa carrée, Zgavier avait été contraint de remettre à plus tard la visite qu’il se promettait de faire à la cabine de l’ophirien (ne serait ce que dans le but purement intellectuel de s’assurer que les légendes à propose des réserves d’or dont les ophiriens ne se départissaient jamais étaient véritablement fondées).
    Respirant l’air vicié de la nuit, Zgavier raffermit sa prie sur la gaffe.. Étonnant comme le simple contact de cette arme dans sa main avait enfin chassé toute nausée de son organisme.
    A l’heure d’aller livrer combat, Zgavier , se sentait enfin dans son élément.
    Il n’en était pas exactement de même pour Himp. 

    « Aie, je me suis encore cogné Zgavier… où es-tu? Zgavier, Haaa ! »

    Le conquérant venait d’attraper son frère par la cape et lui assigna un poste d’observation à ses côtés.

    « Ça ne devrait plus être long... »

    Himp ne put s’empêcher de lâcher un cri de souris quand l’ombre solitaire et décharné du second qu’un besoin naturel avait chassé de son refuge, passa auprès de lui.

    « Himp ! Par les moustaches de Torgal! Me dis pas que c’est ce pauvre malheureux qui t’a collé une pareille frousse ! »

    Le prêtre désireux de faire preuve de vaillance, se releva et se hasarda en direction des écoutilles.
    .
    « par Mitra ! J’en aurai soupé de leurs cordages! Non mais, c’est pas possible, on dirait que celui-là bouge tout seul ! »

    « Bouge tes fesses d’érudit ! Je sais pas ce que c’est mais ce que tu piétines..C’est tout sauf un cordage ! »

    Himp, rendu aveugle par la purée de pois qui avait fait disparaître pont rame et rameurs entendit plus qu’il ne vit les bruits de la lutte acharnée que menait son frère contre ce qui semblait être un paquet de câbles doués de vie propre.
    Désorienté, le prêtre tenta de localiser son frère et, tant bien que mal, essaya de lui lancer un vague de vie…juste au cas où…
    Mais, décidément, Himp était plus à son aise dans la manipulation des grimoires que dans la maîtrise des sorts.
    Une aura jaunâtre émana du prêtre et une onde de choc percuta bruyamment l’assaillant de Zgavier.

    « Par Crom ! je sais pas ce que tu as fabriqué frangin, mais tu viens d’assommer en beauté mon nouveau copain ! »

    Himp ne s’arrêtant pas en si bon chemin s’avança en direction de son frère pour lui prodiguer une vague de vie de derrière les fagots.
    Son pied heurta un objet…
    Machinalement, Himp le ramasse et le fourra dans sa poche.
    Courageux mais pas téméraires, les galériens qui avaient constaté que les étranges câbles perdaient du terrain se décidèrent à prêter main forte à Zgavier.
    Comme la veille, la brume desserra peu à peu son étau.
    Les rameurs, constatant qu’aucun des leurs n’avait disparu s’exclamèrent si bruyamment qu’ils en effrayèrent le second que les clameurs avaient tiré de son antre.

    « Messieurs. Je vous en prie…Un peu de calme… Il n’y a rien qui justifie une telle liesse… »

    Un matelot enroula un bras aussi épais qu’une cuisse de rhinocéros laineux autour des épaules fragile du petit homme.

    « On a donné une bonne leçon à cette saleté de purée de pois ! Réjouis-toi ! aucun de nous n’a disparu ! Tu ferais mieux de nous offrir un coup ! Je sais que tu as plein de trucs intéressants dans ta cabine ! »

    Le second secoua son long nez de rongeur.

    « Vous tous ! A vos postes ! Il n’y a aucune raison de se conduire tel que vous faites ! »[/RP]

    A suivre...
    Last edited by Himp; 22nd October 2013 at 18:52.
    La ballade de Himp

    Vous aimez, ou vous n'aimez pas mes chroniques? N'hésitez pas à m'envoyer vos commentaires par MP!

  9. #9

    Default

    9ème Partie :


    [RP]
    Les lueurs de l’aube, semblable à une coulée de miel maladroitement renversée se déversèrent paresseusement sur la mer.

    « Assez dormis ! La mer est clémente aujourd’hui, c’est l’occasion parfaite de perfectionner votre technique de rame ! »

    Zgavier, les bras lovés autour de la botte crasseuse d’un némédien entrouvrit un œil.
    La vache… Ça faisait longtemps qu’il n’avait pas passé une nuit à repousser des étreintes passionnées et à affronter l’appétit démesuré d’une créature affamée de son corps... Dommage que la seule femelle qui daigne lui porter attention était une bestiole monstrueuse dotée de tentacules aussi épais que les troncs des séquoias de la Vallée de Conall.
    Tiens, Himp était levé, et déjà en grande discussion avec son nouvel ami, Colchghor. Zgavier jeta un regard sombre aux muscles hypertrophiés que le barbare prenait grand soin de mettre en valeur à grand renfort d’huile et de tatouages aux dessins savamment travaillés de manière à mettre du relief à des pectoraux déjà surdimensionnés : Cette dégénérescence de la nouvelle génération d’aventuriers était-elle également une malédiction à mettre sur le compte de la prophétie ? Une bonne escapade en Cimmérie, voilà ce qu’il leur manque aux jeunes d’aujourd’hui !
    Mais, allez savoir pourquoi, Himp s’était entiché de ce colosse et Zgavier devait bien s’en accommoder.
    Colchghor se tourna vers le conquérant. Ses dents, forcément parfaites et éblouissantes s’illuminèrent en un sourire carnassier.

    « Alors, on s’est amusé sans moi cette nuit ? Parole de Colchghor, ta bébête je lui aurai réglé son compte sans y penser ! Tu m’en veux pas, hein… Je suis pas aussi sensible que toi… J’ai pas pour habitude d’épargner les monstres qui confondent mes compagnons avec des amuse-gueules »

    Himp contempla un brin inquiet les deux combattants. On aurait pu allumer des centaines de brasiers funéraires rien qu’avec l’incandescence de leurs regards.
    Himp sut alors qu’il était de son devoir d’intervenir.
    Une fois de plus, le prêtre allait faire preuve d’une habileté sans pareil afin d’enrayer avec diplomatie et tact le conflit qui grondait…. Et il fallait agir vite….

    « Ho, regardez ce que j’ai dans ma poche ! »

    Le prêtre brandit le drôle de caillou noir et lisse qu’il avait ramassé sur le pont.
    Autant la réaction de Zgavier fut prévisible

    « Himp… Ça allait bien quand tu avais 6 ans de ramasser des morceaux de bois et des cailloux… »

    Autant celle de Colchghor fut aussi soudaine qu’inattendue.
    Lorsque l’humble caillasse lui fut mise sous le nez, l’imposant combattant succomba à ce que la maman de Himp appelait joliment une « crise d’émotions ».

    Colchghor, se ratatinant à vue d’œil sous l’œil totalement déconcerté de Himp s’effondra en une flaque geignarde de larmes sur le ponton enfouissant son petit crâne au creux des battoirs qui lui tenaient lieu de main.

    « Jette vite ce focus malheureux! Tu ne sais donc point le terrible pouvoir qui est rattaché à cette pierre ? »

    Colchghor tourna les talons en direction du cuistot qui, comme tous les matins avait ressorti son immonde marmite. Depuis sa plus tendre enfance, Colchghor avait toujours trouvé chaleur et réconfort dans la nourriture. Et seule la perspective de se gaver pouvait enrayer le profond malaise dans lequel le malheureux Himp l’avait plongé.
    Zgavier s’était emparé de la pierre que son frère avait fait rouler à terre.

    « Ça se permet de vous donner de leçons et ça se carapate comme une pucelle à la simple vue d’un petit galet ! Il me revient de moins en moins ton copain…. »

    Himp, l’air inquiet regardait Colchghor qui descendait sa deuxième ration comme si sa vie en dépendait.

    « Colchghor a sillonné pas mal de pays. Il a souvent été confronté à des sorts et des puissances qui dépassent notre entendement…. Montre-moi un peu cette pierre…. »

    Zgavier s’exécuta. Le regard de Himp se fit rêveur. Visiblement, le conquérant avait disparu aux yeux de son frère. Zgavier laissa son frère à sa méditation…
    Et puis, cela aurait été dommage de prendre le risque de se voir taxer sa ration….
    Himp, plongé dans l’étude de la pierre ne s’aperçut même pas que Zgavier et Colchghor avaient mis de côté leurs différends partageant joyeusement le souci commun de remplissage méthodique de leurs panses respectives.
    La pierre tenait tout juste dans la paume du prêtre et iradiait une sorte de chaleur sourde.
    Himp effleura du doigt la texture aussi douce que de la soie, aussi sombre que la nuit.
    Qu’avait donc cette pierre de si particulier pour avoir causé un tel effroi ?
    Indifférent au joyeux désordre qui régnait sur la galère, le jeune prêtre poursuivit son étude.
    La surface de la pierre était si lisse, si dépourvue d’indice que cela en devenait décourageant….

    « Voyons…. Que n’arrêtait pas de ressasser mon vieux maître de grimoires ?…. Étudier le document sous tous ses angles…. »

    Himp éleva la pierre à la lumière du soleil. Les rayons illuminèrent instantanément les fins caractères gravés sur la tranche.
    Ces glyphes au tracé net et inquiétant… ces symboles sinueux et caractéristiques…
    Aucun doute possible pour l’expert en linguistique qu’était Himp…. Mais l’érudit voulait pousser plus en avant son étude avant de se prononcer sur l’origine de la main qui avait apposé de façon si adroite et si sûre l’inscription….

    __________________________

    La mer se faisait plus grosse, les vagues se brisaient furieusement contre l’étrave de l’embarcation.

    « Par les tripes de Torumjumala, Colchghor, arrête de traiter ta rame comme une pucelle de la haute ! T’as du jus de chique dans les veines ce matin ! »

    L’afguhlien jeta un regard brûlant à son compagnon de banc.

    « Hé, depuis quand un albinos d’hyperboréen se permet de manquer de considération pour un fils d’Afghul ? »

    Mais décidément, ce matin, Colchghor souffrait d’une légère baisse de moral que l’abus de ragoût à la « maître coq » n’améliorait pas. Même la perspective d’une bonne querelle avec ce blond délavé d’Haloga ne lui souriait pas.

    « Tu vois le prêtre, la bas ? »

    L’hyperboréen grogna

    « Celui qui joue avec un galet au lieu de ramer ? Quand je vois ça, je me dis que le chef de pont perd la main et qu’il se fait vieux…. Mes épaules me chaufferaient si je m’avisais de faire de même ! »

    Colchghor, agacé l’interrompit sèchement

    « C’est donc vrai ce que l’on dit alors ? Plus les cheveux sont clairs et plus le cerveau est vide? C’est un miracle que la race des hyperboréens existe encore ! Ce que tu appelles un galet, c’est un focus. Il s’agit de sorcellerie très ancienne et très sombre…. Le sort que renferme ce sceau est si puissant et si néfaste qu’aucune matière issue de ce monde ne peut le supporter…. Il n’y a que cette pierre, que l’on dit tombée des étoiles, qui puisse conserver un sortilège d’une telle puissance. On dit que le possesseur d’un focus est en mesure d’invoquer et de se faire obéir par les puissances infernales »

    L’hyperboréen fronça ses sourcils proéminents et serra sa mâchoires prognathe.

    « Tu crois pas que t’exagères ? Ça me paraît un peu tiré par la tresse ton histoire de caillou qui commande aux Enfers… Qui serait assez malsain pour s’abaisser à de telles pratiques ? »

    Colchghor fixa de façon intense un point devant lui qu’Haloga ne parvint à identifier.

    « J’ai ma petite idée sur la question »

    __________________________

    Plus il avançait dans la traduction, plus Himp avait l’impression que les montagnes de Cimmérie s’étaient abattues sur ses épaules.

    « Par le pouvoir de ce focus, que le ventre de la bête reçoive son dû…. »

    Combien cela fut difficile pour Himp de résister à son envie de balancer à la mer ce hideux morceau de roche qui palpitait dans sa main comme un monstrueux oisillon…

    « Frangin ! Tu es encore plus pâle que les roches du Poitain… À toi non plus, cette croisière ne te réussit pas, t’es limite verdâtre… »

    Himp lança le regard du faon orphelin voyant surgir l’archer vanir.

    « Zgavier… Cette chose que tu as combattue… Elle n’est pas venue par hasard… Quelqu’un de l’équipage l’a invoquée, ou du moins tente de la contrôler…. En utilisant cette pierre…. »

    Zgavier rattrapa le caillou qui jusqu’alors lui semblait inoffensif au moment où celui-ci s’échappait des mains inertes du prêtre.

    « C’est une accusation très grave, Himp… Je ne vois pas qui pourrait maîtriser de tels sorts sur cette galère... Au cas où tu l’aurais pas remarqué, on a pas affaire à un congrès de nécromancien de Nebthu. »

    Colchghor s’assit lourdement aux côtés de Himp.

    « Détrompe-toi, le cimmérien. Il suffit juste d’être de la bonne origine pour utiliser ces saletés d’appeaux à cauchemars… »

    Himp fit écho à Colchghor

    « J’ai pu déchiffrer l’inscription... Il s’agit bien d‘un focus qui agit à la manière d’une marque…. Destinée à déchaîner une créature infernale sur une victime qu’on lui aura désignée par le biais de cette pierre…
    Il suffit de la placer sur la personne dont on souhaite se débarrasser… Et des forces occultes se déchaînent sur elle…
    Selon mon expertise, l’inscription est composée de caractères spécifiques de l’ère des grands âges révolus de la nation de Seth… »


    Zgavier leva un regard interrogateur.

    « J’ai la troublante impression que mon frère veut communiquer avec nous…. »

    Colchghor planta un regard noir comme le jais dans les yeux du conquérant.

    « Cette saleté de pierre a été façonnée en Stygie, le cimmérien…. Il n’y a qu’un rejeton infâme de Seth pour salir son âme avec de telles pratiques ! »

    __________________________


    Cela peut paraître surprenant, mais Setennu, le stygien, s’était embarqué de lui-même sur la galère. Ses tentatives infructueuses dans la carrière d’aventurier l’avaient dissuadé de poursuivre dans cette voie professionnelle et, comme son vieux papa lui avait seriné que « les voyages forment la jeunesse », Setennu s’était dit que, à tout bien réfléchir, le métier de matelot présentait l’avantage de cumuler une certaine sécurité de l’emploi avec un petit parfum d’aventures qui faisait toujours son effet auprès des servantes des tavernes des ports qu’il visitait assidûment.
    Officiant de jour, Setennu ne se sentait pas vraiment concerné par les événements de la nuit passée. Oh, il compatissait bien volontiers à la perte de ses camarades, il n’était pas un mauvais bougre mais dans le fond de son cœur, il modifiait le scénario des événements afin de s’y attribuer un rôle plus conséquent, qui, sans nul doute, lui attirerait les faveurs de la plus belles des servantes et un crédit illimité auprès des taverniers….
    Et puis….le destin de Setennu bascula violemment avec l’atterrissage de ce colosse originaire d’Afghulistan sur son dos.
    Les choses ne s’arrangèrent pas, loin de là. Setennu vit un cimmérien s’approcher de lui et lui tenir des propos qui n’avaient de sens que pour le conquérant.

    « Stygien,… Tes pratiques me dégoûtent...Tu as causé la mort d’innocents sans te salir les mains en convoquant les pires créatures qui hantent les enfers… »

    Colchghor gronda

    « Te trancher la gorge serait un sort bien trop doux pour un démon tel que toi….Tu vas périr par la main même de ton monstrueux serviteur ! »

    Avec rudesse et dans un silence de mort, Setennu fut conduit au mât de la galère. Les deux hommes, avec la bénédiction du chef de pont et du second, ligotèrent le stygien sans prêter attention à ses protestations d’innocence.
    Setennu fut réduit au silence quand Zgavier produisit la pierre qui irradiait une chaleur malsaine dans sa main.

    « Permets-moi de te rendre ce que tu as fait tomber cette nuit…. Et pour éviter que tu ne le perdes de nouveau, je vais l’attacher solidement à ta ceinture… »

    Setennu se mit à hurler.

    « Enlevez-moi ça ! C’est un focus ! Vous allez attirer Seth seul sait quelle abomination ! Vous ne pouvez pas faire ça ! »

    Colchghor assomma le stygien d’une gifle magistrale.
    Zgavier grimaça

    « Sûr que ça me démangeait aussi…. »
    [/RP]

    À suivre….
    La ballade de Himp

    Vous aimez, ou vous n'aimez pas mes chroniques? N'hésitez pas à m'envoyer vos commentaires par MP!

  10. #10

    Default

    9ème Partie :


    [RP]
    Le crépuscule transformait le ciel en un immense hématome aux teintes malsaines. Les rameurs jetaient des regards inquiets aux flots couleur de plomb qui recelaient l’abominable complice du Stygien ligoté qu’ils avaient accueilli parmi eux comme un membre de leur famille. Setennu, plongé dans un état léthargique semblait totalement indifférent au sort funeste qui surgirait de l’océan... Une sorte de fièvre avait gagné l’équipage. Un hyperboréen se fit refaire le portrait par un Némédien après avoir émis une remarque totalement anodine à propos du teint caramel de son compagnon. Le chef de pont et le second n’étaient pas trop de deux pour étouffer dans l’œuf les querelles qui ne cessaient d’exploser entre des matelots aussi nerveux que des traqueurs affamés. Himp, terrorisé par le climat électrique qui régnait sur la galère se cramponnait à sa rame comme si sa vie en dépendait.

    « Par Mitra... je ne cautionne absolument pas vos agissements à toi et Colchghor... Provoquer la venue de cette créature pour châtier le Stygien... N’as-tu pas l’impression de t’abaisser à son niveau ? »

    Zgavier lança un regard moqueur à son frère.

    « Décidément, notre mère ambitionnait de faire de toi une parfaite vestale ! Tu as de la chance que personne n’ait entendu tes idioties...Tu aurais été bon pour te retrouver avec ta cape enfoncée dans le fondement… »

    Zgavier se releva et contempla avec satisfaction l’agitation qui régnait sur le pont.

    « Regarde-moi ce freluquet d'Ophirien qui croit pouvoir séparer les deux brutes du banc N°4! Parfait... J’ai tout le temps d’aller vérifier si notre second a bien rangé sa chambre  »
    Himp regarda avec désapprobation le large dos de Zgavier.
    « Décidément, ce garçon ne semble pas être étouffé par ses valeurs morales... »


    Zgavier se mêla avec adresse dans la cohue désordonnée qui régnait sur la galère. Furtivement, il se glissa jusqu’à la poupe et parvint sans encombre à la cabine du second. La serrure se montra bonne fille et ne résista que pour la forme aux assauts plein d’adresse du conquérant. Zgavier pénétra rapidement dans la pièce et referma doucement la porte derrière lui. Le conquérant ne put s’empêcher de grimacer devant la statue difforme de Al'Kiir, la divinité vénérée dans tout l’Ophir, que le second avait disposé tout contre sa couchette. Zgavier supposa que l’aspect monstrueux du dieu devait flanquer un complexe d’infériorité tel aux cauchemars, qu’aucun mauvais rêve ne devait s’aviser d’assaillir le sommeil du second...
    La pièce était minuscule et Zgavier ne mit pas longtemps à découvrir les armes que le second avait confisquées. Les yeux brillants de convoitise, le conquérant soupesa une masse, jaugea une épée à deux mains... Ça, c’était autre chose que les rondins, marteaux et autres gaffes que le cimmérien avait été contraint d’utiliser depuis le début de son expédition!
    Zgavier, ayant revêtu une cotte d’acier et convenablement équipé envisagea avec beaucoup plus de sérénité le rendez-vous avec la créature cauchemardesque que l’océan n’allait pas tarder à vomir... Apercevant les pièces d’or glissées dans les griffes de Al'Kiir, Zgavier décida de vérifier la légende qui voulait que, si les Ophiriens vénéraient un dieu aux doigts crochus, c’était pour l’exemple qu’il leur donnait de ne jamais se départir de son magot...

    « Après tout, ma prestation sur cette galère ne prévoyait pas la lutte contre un encornet géant ! Il faut bien que je m’attribue une petite compensation en espèces sonnantes et trébuchantes !»

    Le petit coffre ne resta pas longtemps à l’abri de sa cachette et fut rapidement contraint de livrer ses richesses au conquérant.

    « Comment le second d’une galère pouilleuse peut-il avoir amasser un tel butin? Par Crom ! Il y a de quoi se payer une pension de délices à vie dans la taverne de la mère maquerelle de Vénarium ! »

    Dans un frémissement de pure délectation, Zgavier plongea ses mains dans les pièces d’or et d’argent.

    « Y a pas à dire, c’est un de mes moments préférés... »

    Alors que les coutures de ses pantalons commençaient à protester contre le traitement inique qui leur était fait, Zgavier s’immobilisa. Ses mains plongées dans le coffre percevaient des formes qui lui étaient désagréablement familières... Cette douceur poisseuse qu’il sentait sous ses doigts...Cela n’avait rien à voir avec le contact franc de l’or... Le conquérant contempla, interdit ce que ses doigts venaient de pêcher au fond du coffre de l’Ophirien.

    « Par toutes les catins de Vénarium , qu’est-ce que ça fait là ? »

    - - -



    Les nuées semblaient vouloir s’enrouler autour de la galère et leurs teintes violacées parcourues d’éclairs sourds avaient définitivement étranglé les derniers rayons de soleil.
    Himp contemplait anxieusement les flots, se rappelant le plan que Zgavier avait décidé de mettre en œuvre. Certes, « On attend que la bébête vienne chercher son casse-croûte, et on lui fait sa fête ! » avait été compris par tout l’équipage, mais...est ce que cela allait suffire pour lutter contre l’abomination déchaîné par un sort aussi ancien et néfaste que le focus ? Et puis... Les vagues se mirent à bouillonner, diffusant un brouillard toxique en direction de la galère.
    Les yeux exorbités, le prêtre vit un tentacule aux dimensions monstrueuses se déployer paresseusement aux dessus des flots. Les ventouses semblables à des bubons purulents étaient aussi grosses que la tête d’un homme et lâchaient par intermittence des jets de pus nauséabonds.  Puis un autre tentacule, un autre, et encore un autre sortirent à leur tour de l’eau...Cela ne semblait pas vouloir s’arrêter...
    La créature était encore à distance respectable de la galère et Himp eut le temps d’observer, en tremblant de dégoût les bras contrefaits du monstre : certaines ventouses présentaient des bourgeons de tentacules, d’autres des yeux aveugles et révulsés. Malgré son aspect boursouflé et déformé, l’être se dirigeait à bonne allure en direction de l’embarcation.

    « Que Mitra aie pitié de nous !Quel enfer a vomi cette abomination ? Et où se trouve donc Zgavier à l’heure du combat ? »


    - - -

    Le conquérant contemplait interdit la provision de focus qu’il venait d’extraire du coffre de l’Ophirien.
    Un brouillard de rage sanguinaire galvanisa le barbare.

    « Par Crom ! Cet immonde chacal sans cesse dans l’ombre du chef de pont est le véritable maître du focus ! »

    Un mince rictus flotta sur les lèvres de Zgavier alors qu’il s’emparait de la provision de pierres noires

    « Jamais pu encaisser la mine de rongeur du second...J’ai hâte d’entendre sa façon de chanter quand ma masse lui frottera les oreilles ! »

    Vif comme l’éclair, le conquérant sortit de la cabine et se retrouva plongé dans la tourmente qui régnai sur le pont.
    Affamée par son jeûne forcé de la veille, l'hideux kraken avait laissé là toutes mesures de prudence et avait hissé son corps massif et écailleux sur la galère. Croulant sous le poids de son monstrueux passager, le bateau gémissait et s’était à demi enfoncé dans les flots sombres. Les tentacules grouillaient sur les planches, fauchant au passage les malheureux qui se trouvaient sur leur passage.
    Zgavier jeta un coup d’œil au prisonnier qui, malgré sa terreur se trouvait encore hors d’atteinte du cauchemar que l’océan avait régurgité. Le conquérant alla retrouver son frère occupé à porter secours à un Némédien estourbi après avoir été balayé par un tentacule. Himp, le visage grave écouta le terrible récit de son frère.

    « Alors, cette histoire est encore plus terrible que tout ce que nous imaginions...Va chercher ce traître à l’humanité...Je me charge d’aviser l’équipage et de secourir ce malheureux que nous avons accusé à tort... »

    Zgavier ne prit pas le temps de répondre. La créature progressait à vue d’œil, chaque instant comptait... Mais où donc un rat aussi lâche et hypocrite tel que l'Ophirien pouvait se terrer ?
    A la vue du bec cuivré capable de briser un homme en deux qui s’avançait en claquant en sa direction, le Stygien supplicié se remit à hurler.

    « Je te le concède, je n’apprécierai pas d’être à ta place...Mais ce n’est pas une raison de crever les tympans de celui qui vient te délivrer ! »

    D’un coup de dague, Himp avait tranché les liens du Stygien et, lui ôtant le focus de sa poche remit l’homme aux mains de ses compagnons un brin embarrassés.

    « Sans rancune, hein...Faut pas nous en vouloir...On est un peu sur les nerfs...Et puis vois le bon côté des choses, t’as passé un après-midi sans toucher à ta rame... »

    La satisfaction du devoir accompli fit éclore un sourire sur les lèvres du prêtre.

    « Encore une bonne action d’accomplie...Zgavier ? Pourquoi diable me tapotes-tu le dos avec autant d’insistance ? »

    N’obtenant pas de réponse, Himp se retourna doucement... Oups...une fois de plus l’étourderie du prêtre lui avait joué un mauvais tour... Le focus, irradiant une chaleur malsaine au creux de la main de Himp avait poursuivi son sinistre office. Et le malheureux Himp eut le loisir de plonger ses yeux myopes dans les rétines immenses et hallucinées de la créature qui s’apprêta à refermer ses tentacules sur le prêtre.
    Animé par une inspiration de fureur, Zgavier s’était glissé avec la souplesse d’un félin au cœur de la cambuse. Un mouvement en provenance des sacs de riz lui arracha un rictus carnassier. Bondissant avec souplesse, le conquérant abattit une poigne de fer sur l’échine de l’Ophirien qui, ayant abandonné toute dignité s’était tapi comme un parasite sous les caisses de denrées périssables.

    « Pour une fois qu’il se passe quelque chose d’intéressant sur cette galère...Ce serait vraiment dommage que tu manques ça ! »
    [/RP]

    À suivre….
    La ballade de Himp

    Vous aimez, ou vous n'aimez pas mes chroniques? N'hésitez pas à m'envoyer vos commentaires par MP!

Page 1 of 2 12 LastLast

Posting Permissions

  • You may not post new threads
  • You may not post replies
  • You may not post attachments
  • You may not edit your posts
  •